L’Espagne finira-t-elle par enterrer Franco ? (3/3)
Lire les deux premiers épisodes de notre série : « Qui veut la peau des derniers franquistes ? » et « La juge qui venait d’Argentine ». Le tombeau de Franco dans un hélicoptère : en Espagne, l’automne 2019 est marqué par l’exhumation express du dictateur. Fissa et par voie aérienne, histoire d’éviter les rassemblements de nostalgiques au bras tendu devant son mausolée du Valle de los caídos, dans la région de Madrid. Une image digne de l’ouverture de la Dolce Vita de Fellini, qui met fin à la bataille légale menée durant plus d’un an par le gouvernement socialiste de Pedro Sánchez. Suffisant pour désigner le président du gouvernement socialiste comme le grand gagnant de la chasse aux franquistes ? Pas sûr… Car cette exhumation s’en prend certes au chef de bande, mais le dictateur, mort et enterré, n’aura eu aucun compte à rendre de son vivant. En même temps, à la date de son exhumation, au moins 30 000 enfants volés et leurs familles attendent toujours justice et réparation. Derrière les murs du mausolée, dans des fosses communes, sur tout le territoire, gisent les corps de plus de 140 000 personnes exécutées dont les parents attendent une sépulture décente. Les bourreaux et hauts dignitaires de la dictature, impliqués dans des crimes contre l’humanité sous le régime et pendant la transition démocratique, vivent en totale impunité, en pleine démocratie. L’Espagne refuse toujours de faciliter les déclarations des nombreux inculpés dans l’unique procédure judiciaire contre les crimes du franquisme instruite depuis Buenos Aires (voir notre épisode précédent) : la plainte ou querella argentine. Lancée en 2010, la querella connaît son apogée entre 2013 et 2014. À cette époque, la doyenne des militants, 89 ans, Ascension Mendieta, obtient enfin gain de cause : un jugement favorable pour faire exhumer son père d’une fosse commune de Guadalajara, en Castille – La Mancha. Les plaintes des…