Deux semaines à bord de l’Ocean Viking
C’est un mardi après-midi de décembre, il fait plein soleil. J’arrive dans le port de Livourne et l’Ocean Viking se dresse devant moi, un navire de 70 mètres de long. L’humeur est joyeuse à bord et je suis accueilli à bras ouverts. L’équipage est opérationnel depuis le début du mois et revient de sa première patrouille. 26 personnes ont été secourues, toutes sont saines et sauves. Le lendemain, on va quitter le port pour mettre le cap vers le sud. La mer Méditerranée est la route migratoire la plus meurtrière au monde – plus de 2 500 victimes en 2023. Depuis 2016, avec d’autres ONG, SOS Méditerranée navigue entre l’Italie, la Tunisie et la Libye pour secourir les personnes en détresse – d’abord avec le navire Aquarius, puis avec l’Ocean Viking à partir de juillet 2019. Ces dernières années, une partie de « l’opinion publique » en Europe – notamment des activistes d’extrême droite – les ont pris pour cible, sans parler des autorités italiennes qui adoptent toutes sortes de mesures qui rendent leur travail plus difficile. Le récent décret Piantedosi, par exemple, oblige les ONG à naviguer sans délai vers le port assigné après un sauvetage. « Dans le passé, on devait parfois attendre 15 jours avant que l’Italie nous attribue un port de débarquement, mais ça nous permettait au moins de sauver d’autres personnes, explique Jérôme, secouriste. Là, on a sauvé 26 personnes et on a dû aller jusqu’au nord de l’Italie. Et si on n’obéit pas, on se fait immobiliser le navire. » La journée à bord commence toujours par une réunion à 8h15. Tout le monde se rassemble et Anita, la coordinatrice de recherche et de sauvetage, donne le briefing. Elle nous explique qu’on va devoir affronter une tempête pendant deux jours, avant de pouvoir naviguer…