Samedi 9 novembre, 19h, Salon-de-Provence (13) – Il est 19h10 lorsqu’un groupe de manifestants de gauche s’engage sur la rue Théodore Jourdan, devant le tout nouvel espace du député RN Tonussi, qui qualifie lui-même sa permanence de « maison du peuple ». Le petit groupe déploie une grande banderole : « Le Pen et Macron s’allient contre le peuple. » Ils lancent des confettis devant l’élu ainsi que devant les nombreux soutiens des antennes locales du Rassemblement national (RN) présents pour fêter l’événement. Habitué à ce type d’actions, Alexandre Beddock mène la petite foule de manifestants. Ce militant de Salon et candidat du Nouveau Front populaire, arrivé 3e aux dernières législatives, s’engage en premier et salue les députés Tonussi et Baubry, avant de faire quelques pas fièrement devant la banderole, un sourire ironique aux lèvres tandis qu’il applaudit sarcastiquement les soutiens du RN. Derrière lui, les militants tenant la banderole n’ont guère le temps de crier faussement « bravo ! », que le service d’ordre (SO) de l’événement les charge et les renvoie manu militari – sans discussion.
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« Cela s’est passé très rapidement ! », raconte Mathilde, 28 ans, militante de Salon. Elle filme la situation avec son téléphone, avant que celui-ci ne tombe lorsqu’elle reçoit un coup au bras. Elle relate :
« À partir de ce moment-là, je ne pouvais plus filmer et j’ai vu mon copain se faire étrangler. »
Alexandre Beddock est quant à lui saisi par le torse et repoussé en arrière. Il reçoit un coup doux mais agressif au visage par un homme portant une doudoune sans manches verte, alors qu’il est violemment repoussé, tout comme ses camarades, de la rue Théodore Jourdan vers la place Crousillat, juste à côté. Son médecin lui prescrit trois jours d’interruption temporaire de travail (ITT). Des actes de violence que StreetPress a pu confirmer grâce aux vidéos de l’événement. Simultanément, Daniel Captier, le suppléant de Tonussi, pointé du doigt par la presse en raison de tweets racistes, s’adresse à Alexandre, rouge de colère devant trois témoins : « Saloperie ! » Captier aurait même ajouté : « Alexandre, t’es mort ! », à l’encontre du militant, selon ce dernier dans sa plainte, le 14 novembre.
Réaction de Tonussi
Au même moment, le député Tonussi intervient et tente de calmer l’homme avec la doudoune. Thibauld, un des manifestants présents et directeur d’entreprise salonais de 36 ans, observe : « Il voulait simplement préserver son image politique. Il a feint de vouloir apaiser la situation. » Dans la foulée, des supporters du parti d’extrême droite tentent violemment d’empêcher Thibauld de filmer avec sa caméra. Lui finit avec une ITT de zéro jour – ce qui a néanmoins une valeur juridique en cas de condamnation – et doit porter une attelle pendant deux semaines. Il reprend :
« Quand ils m’ont frappé le bras, le député était déjà reparti pour son inauguration. »
Lors de l’action, une personne sans brassard de sécurité visible, masquée par un cache-cou rouge et une casquette bleue agite une bombe aérosol au poivre de 300ml face aux manifestants. Bien qu’il ne l’active pas, le port de cette arme de catégorie B (comme les pistolets) est strictement encadré et réservé aux agents de sécurité professionnels, gendarmes, policiers ou CRS. Au début de la charge, un autre membre du SO a même pris soin de dissimuler un modèle identique dans sa poche en réalisant qu’il était filmé.
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Le rassemblement s’achève par une remise de prix ironiques, sur la petite place Crousillat : « Prix du courage en politique » ou « Prix de l’écologie pour la lutte acharnée contre… rien ». Ensuite, les manifestants quittent les lieux et l’inauguration se poursuit dans la nuit, en présence de Romain Baubry, député de la circonscription voisine, déjà critiqué par StreetPress pour ses recrutements de collaborateurs néofascistes…
Dans le compte rendu de La Provence, intitulé « Tonussi chahuté lors de l’inauguration de sa permanence », le député ne fait aucune mention de l’intervention violente de son entourage. « Ce ne sont pas des gens violents, donc cela s’est tout de même bien passé, c’était festif », peut-on lire dans le quotidien. Le parlementaire a même eu l’audace de déclarer :
« Je suis ouvert à la discussion et je défends la liberté d’expression. »
Malgré cette prétendue ouverture, Romain Tonussi n’a pas répondu aux questions de StreetPress concernant la réaction de son SO. Pour leur part, Alexandre Beddock et Thibauld ont déposé une plainte le 14 novembre pour violences.
Photo d’illustration provenant du compte Twitter du député Romain Tonussi.
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