Aux Championnats du monde de lutte dans la sauce gravy
« Si t’aimes la sauce, fais-moi signe ! » Cette phrase est sortie tout droit de la bouche d’un candidat répondant au doux nom de Pyrexeler (oui, comme le plat qui va au four). Question déguisement, le mec a tout donné : son costume est un pot rouge, la fameuse sauce Gravy en granulés de la marque Bisto, célèbre outre-Manche. Son couvre-chef s’ouvre sur de véritables granulés qu’il jette ensuite avec ferveur sur la foule, comme une jeune mariée au sortir de l’église. Vous vous demandez peut-être où je suis. Eh bien, sachez que je me trouve actuellement au nord du Royaume-Uni, dans un village du Lancashire, pour assister au World Gravy Wrestling Championships, soit les Championnats du monde de lutte dans du « Gravy », une sauce riche à base de jus de viande et adorée des britanniques. Ma présence ici tient du miracle : j’habite Londres, je n’ai pas le permis, c’est un jour férié et le réseau ferroviaire est en grève. Cela dit, j’ai quand même réussi à trouver le moyen de faire les cinq heures de trajet. Personne ne pourra donc douter de mon dévouement à couvrir un événement absurde, et personne ne pourra – encore moins après lecture de mon compte-rendu – contester le fait que cet événement était, en effet, absolument absurde. Si cette sauce brune et juteuse sert d’habitude à enduire des rôtis, on n’a clairement pas le temps pour ça ici. Dans l’arrière-cour du pub The Rose N’Bowl à Stacksteads, 1 500 litres de sauce chaude sont déversés sur un ring où seize hommes et huit femmes vont s’affronter pendant deux minutes de lutte acharnée – on ne peut que supposer que cette répartition inégale s’explique par le fait que la bêtise n’est pas toujours un concept facile à vendre. Les participant·es doivent porter des déguisements et tous…