La naïveté derrière le désespoir post-électoral
Quel genre de réponse peut-on offrir à une personne qui a déjà décidé que le monde s’arrête ici ?
Quel genre de réponse peut-on offrir à une personne qui a déjà décidé que le monde s’arrête ici ?
Tribunal de Bobigny (93), 7 novembre 2024 – « Je suis un citoyen français. J’ai des droits. J’ai cru que j’allais mourir. » La juge achève la lecture de la lettre à haute voix puis porte son regard sur la salle d’audience. En face d’elle, Aziz E. demeure silencieux. Ce qu’il avait à exposer, il l’a consigné dans un signalement adressé à l’inspection générale de la police nationale (IGPN) il y a plusieurs années. Il y relate les abus qu’il a subis de la part de deux agents de la BAC de Seine-Saint-Denis, le 26 avril 2020, au commissariat d’Aubervilliers. À ce moment-là, le confinement dû à la pandémie de covid-19 est en vigueur et Aziz enregistre un contrôle lorsque les policiers l’arrêtent pour l’obliger à effacer les images. Il est conduit au poste pour vérification d’identité, où il accuse le chauffeur de lui avoir « tasé les parties intimes » dans le véhicule, avant de le malmener dans un couloir du commissariat. « Mon téléphone se trouve au commissariat si vous souhaitez des preuves », a-t-il noté dans la lettre, soigneusement lue par la magistrate.
Cependant, parmi l’ensemble des violences rapportées, seuls trois gestes sont retenus dans l’enquête, capturés par les caméras de surveillance à l’intérieur du poste. Comme le rappelle le procureur lors de l’audience, concernant les violences policières :
« Ce qui n’est pas filmé n’apparaît pas dans le dossier. »
Et peu importe que, lors de son audition à l’IGPN, Aziz E., âgé de 25 ans au moment des faits, ait décrit une longue série de coups, d’injures et de références à sa foi de la part des agents, depuis son arrestation jusqu’à ce qu’il cède à déverrouiller son téléphone pour faire disparaître la vidéo. Les photographies de ses blessures, jointes à son signalement, montrent des marques de piqûres sur la jambe et aux parties génitales attribuées au taser, ainsi que de nombreuses rougeurs « compatibles avec des traces de coups », selon le procureur.
Le rapport d’analyse des vidéos n’impute à Thomas B. qu’un coup de genou alors qu’il tirait « avec vigueur » le jeune homme, qui ne « résiste pas », du véhicule vers l’entrée du commissariat. À la barre, cet homme de 31 ans, désormais muté à la police de secours, défend l’emploi de la force « strictement nécessaire » pour conduire l’interpellé et conteste avoir porté un coup. Le jeune aurait, selon lui, simplement « perdu l’équilibre ». Il confesse en revanche un croche-pied, également filmé, alors qu’Aziz E. s’apprête à sortir du commissariat, qualifiant cela de « geste regrettable ».
S’agissant de Vincent R., il est accusé d’avoir, peu avant, armé le poing en direction d’Aziz E., dos au mur et « déboussolé » dans l’entrée du commissariat, pendant que les autres agents inspectent son téléphone. L’homme, d’une stature athlétique, ne comprend « plus pourquoi il a agi ainsi ». Comme son collègue, il admet avoir commis « un geste regrettable durant une période gênante », sans y voir pour autant une forme de violence. Sa défense est hésitante :
« Je ne connais pas le code pénal sur le bout des doigts. »
À la barre, quatre ans après les événements, la victime, un peu frêle, semble désorientée. Aziz E. a du mal à suivre les questions du tribunal. Son avocate, Maître Déborah Zubillaga, décrit son client comme une victime « particulièrement traumatisée », s’étonnant qu’il n’ait pas fait examiner ses blessures par un médecin légiste par « méfiance à l’égard de tout service collaborant avec la police ».
Comme c’est souvent le cas dans les affaires de violences collectives, les avocats de la défense ainsi que ceux de la partie civile critiquent également la portée restrictive de l’enquête. « À aucun moment, il n’a été demandé d’identifier les policiers ayant pu interagir avec lui », dénonce l’avocat de Thomas B., Maître Martin Dier, soulignant qu’aucune photo n’a été présentée à la victime. L’avocate d’Aziz E. se désole surtout du « refus des agents de témoigner contre leurs collègues ». « C’est tout un service qui se protège les uns les autres », ajoute-t-elle. L’ensemble des violences avait d’ailleurs été nié par les deux agents face aux enquêteurs, jusqu’à ce que les images leur soient montrées.
Le procureur, de son côté, défend dans son réquisitoire le « bon travail » des enquêteurs sur « un dossier ancien », ainsi que la décision du parquet d’écarter des poursuites l’intégralité de la scène de l’interpellation et du véhicule de police. Car sans l’activation des caméras piéton, pour elle :
« C’est parole contre parole, nous ne saurons jamais ce qu’il s’est réellement produit. »
Les véritables motivations derrière le transport d’Aziz E. au commissariat soulèvent également des questions. Car, bien que tous les policiers affirment avoir cherché à effectuer une vérification d’identité – laquelle permet de retenir une personne pendant quatre heures – celle-ci n’a finalement jamais eu lieu. Pour les agents, c’est parce qu’Aziz E. leur aurait, juste devant la cellule, montré sa carte sur son téléphone.
Ce serait d’ailleurs pour consulter sa carte que les quatre policiers auraient manipulé le téléphone à l’accueil. Une version répétée par Vincent R., qui avait pourtant admis lors de son audition avoir supprimé la vidéo « de peur qu’elle ne circule sur les réseaux sociaux ou ne tombe entre de mauvaises mains ». Cela a agacé la juge : « Nous sommes des professionnels après tout. » « Nous n’avons pas besoin de quatre personnes pour contrôler une carte d’identité », renchérit plus tard le procureur, qui rappelle aux policiers que le fait d’être filmé peut être « très désagréable, mais c’est néanmoins légal ». Mais ces actes, eux aussi, ne sont pas poursuivis. Maître Déborah Zubillaga, l’avocate d’Aziz E., dénonce quant à elle un « prétexte fallacieux » et envisage d’initier une nouvelle procédure pour « détention arbitraire ».
Pour les trois gestes poursuivis, le procureur requiert six mois d’emprisonnement avec sursis contre Thomas B, accompagnés d’une interdiction de port d’arme pendant cinq ans. Concernant son collègue Vincent R, la magistrate demande trois mois avec sursis. Le jugement est attendu le 5 décembre.
L’évaluation représente un aspect fondamental de l’enseignement. C’est un moyen pour les éducateurs d’ajuster et de réguler leur pratique, et c’est un feed-back essentiel tant pour eux que pour leurs élèves.
Cependant, une forme spéciale d’évaluation a pris une ampleur considérable ces dernières années : les évaluations nationales. Initiées en CE2 en 1989 et élargies à partir de la rentrée 2018, elles ont continué à se développer et impliquent désormais les niveaux de CP, CE1, CE2, CM1, CM2, 6e, 4e, 2nde et la première année de CAP.
Ainsi, 2024 sera une année record pour l’Education nationale en matière d’évaluations ! Plus de 6 millions d’élèves ont effectué des tests standardisés au début de l’année scolaire. Quel est l’objectif de cette évaluation inutile ? Quels sont les rôles de ces tests et quels sont les effets indésirables que critiquent les syndicats d’enseignants qui s’y opposent ? Que révèle cette évaluation incessante sur l’évolution de l’école et de la profession enseignante ?
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Considérons le cas du CP. Selon les informations fournies sur le site du ministère, en septembre, les élèves ont passé trois tests de dix minutes en français, et deux de onze minutes en mathématiques. Ensuite, à la fin janvier, en français, il y aura deux sessions d’évaluation de dix minutes et deux épreuves individuelles d’une minute chacune (si vous avez 25 élèves, il faudra s’organiser pour occuper les autres en attendant !). Enfin, en mathématiques, un test de huit minutes et un autre de treize minutes.
Il faut envisager les élèves de CP, qui n’ont eu en septembre qu’une seule semaine de cours depuis la rentrée : ils ont changé d’établissement, de rythme, sont assis plus longtemps qu’en maternelle, ont leur cartable et leurs affaires à gérer… et ils se retrouvent déjà en situation d’évaluation.
Ce que la présentation officielle omet de mentionner, c’est le temps d’explication nécessaire pour des élèves un peu stressés et désorientés, les soucis d’organisation matérielle, le simulacre du chronométrage… Après la passation, il y a également la saisie des résultats par l’enseignant (il serait intéressant de discuter des applications et logiciels utilisés dans l’Education nationale et de l’obsolescence du matériel…), sans oublier leur traitement ultérieur.
Ce mélange entraîne le stress des examens, la surcharge de travail des enseignants et la perte de temps qui nuit aux apprentissages. En effet, ces tests sont principalement effectués au début de l’année, période où les élèves commencent à établir quelques repères et habitudes de travail… qu’ils perdent en raison de ces évaluations gourmandes en temps et déstabilisantes.
Nombreux sont les enseignants qui déplorent la perte du plaisir d’apprendre et de la motivation sous la pression de la performance et des risques d’échec. Il est important de noter que ces évaluations sont critiquées depuis leur introduction par les enseignants, car elles ne reflètent pas ce qui se passe en classe.
Souvent, des connaissances non encore abordées sont évaluées. Ces examens imposent des standards aux niveaux de classe, alors que l’éducation est organisée par cycles, qui englobent plusieurs niveaux (CP/CE1/CE2 pour le cycle 2, CM1/CM2/6e pour le cycle 3), permettant normalement des apprentissages prolongés.
« Peser un cochon ne l’a jamais fait grossir », selon un proverbe rural. Le temps consacré à ces tests, qui ne sont pas en lien avec le travail des enseignants, ne contribue que très peu à la remédiation et encore moins aux apprentissages. Ces activités envahissent le temps sans réelle efficacité pédagogique.
Rappelons que l’évaluation en soi n’est pas problématique. Tous les enseignants testent leurs élèves et proposent des évaluations diagnostiques (avant les apprentissages), formatives (pendant) et sommatives (après). Tous cherchent à déterminer le niveau des enfants qui leur sont confiés. Mais pas de cette manière !
Alors, quelles sont réellement les fonctions de ces évaluations nationales ? Pour répondre à cette question, il est essentiel de remonter à leur origine. Historiquement, il y a toujours eu des dispositifs pour évaluer la performance du système éducatif. Toutefois, pour cela, il n’est pas nécessaire de faire passer des tests à tous les élèves, un échantillon pourrait suffire (comme pour Pisa).
Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education de 2017 à 2021, a eu une influence significative dans l’adoption généralisée des évaluations. Elles se sont intensifiées avec l’expérimentation des dédoublements dans les classes de CP et CE1 dans les réseaux d’éducation prioritaire (REP).
Le ministre considérait qu’il était nécessaire que ces dispositifs soient mesurables. « Il doit y avoir une hausse des évaluations, non pas pour le plaisir d’évaluer, mais parce que c’est un levier indiscutable d’amélioration », affirmait-il en 2018.
Cependant, bien qu’elles soient présentées comme un outil d’évaluation des politiques publiques, elles fonctionnent avant tout comme un outil de pilotage. Au final, elles servent également et surtout à évaluer et contrôler les enseignants.
Comme nous l’avons constaté, cela entraîne effectivement une certaine standardisation des pratiques des enseignants. C’est l’évaluation (l’aval) qui conditionne l’approche pédagogique (l’amont). C’est ce qu’on appelle le « teaching to test ». Si l’on se concentre uniquement sur les « fondamentaux », on risque de n’enseigner que ces éléments.
Ce pilotage et cette normalisation se manifestent tant au primaire qu’au secondaire. Et, au collège, ils se combinent avec une dynamique de sélection, illustrée par les fameux « groupes de niveaux ».
D’une certaine manière, nous assistons à une dépossession du métier d’enseignant qui remet en question la liberté pédagogique. L’école ne doit ni devenir ni être une institution avec des pratiques uniformisées, éloignées des besoins des élèves.
Au-delà des évaluations nationales, l’Education nationale souffre d’un mal qui touche de nombreux autres organismes et services publics : la quantophrénie. Ce terme spécifique, introduit par le sociologue américain Pitrim Sorokin, désigne « la maladie qui vous pousse à tout mesurer et à tout quantifier ».
Le sociologue Vincent de Gaulejac l’évoque pour parler de « l’idéologie managériale » dans son ouvrage La Société malade de la gestion. Cela rejoint l’affirmation du célèbre auteur de management Peter Drucker, qui disait que « vous ne pouvez pas gérer ce que vous ne pouvez pas mesurer » : là où le qualitatif serait nécessairement subjectif, le quantitatif offrirait l’objectivité.
Les directeurs d’école et les personnels de direction des établissements secondaires peuvent en témoigner. Une partie de leur travail consiste à compléter des tableaux Excel pour le niveau supérieur.
Les évaluations nationales ne sont qu’une extension de la mesure aux enseignants et aux élèves, illustrant une idéologie managériale appliquée aux services publics. Mais peut-on réduire l’acte éducatif à des tests standardisés et des statistiques ? Bien qu’il soit essentiel d’évaluer, laissons aux enseignants le soin de le faire à leur rythme et selon leur méthode ! C’est leur profession et leur expertise.
Bérénice Bejo et Sébastien Thoen sont présents dans Clique. L’actrice y présente son spectacle « Les gens de Bilbao naissent où ils veulent » et aborde son arrivée en France, son César de la meilleure actrice ainsi que le succès de “Sous la Seine”. De son côté, le comédien parle des coulisses de son ancienne émission “Actions Discrètes”, de sa vision de l’humour Français et de son admiration pour Gérard Jugnot.
La performance théâtrale de Bérénice Bejo
Bérénice Bejo est une actrice de renom. Avec une carrière de près de vingt ans et plus de cinquante films, elle s’est imposée comme l’une des figures majeures du cinéma Français. Quelques mois après la sortie de “Sous la Seine” sur Netflix, elle se produit dans son premier seul-en-scène : “Les gens de Bilbao naissent où ils veulent” au Théâtre Marigny à Paris. Cette pièce, mise en scène par Johanna Boyé, est directement inspirée du roman de Maria Larrea. “C’est un exercice complexe : qui suis-je pour croire que je vais capter l’attention de 300 personnes pendant 1h30 ? Mais je réalise que je les entraîne dans mon récit avec moi.” C’est une première pour la comédienne, qui n’avait jusqu’alors joué que de très rares fois au théâtre.
Ce roman a une importance particulière pour elle. L’autrice et l’actrice partagent une histoire familiale similaire. Toutes deux sont filles de parents ayant dû fuir leur patrie à cause de la dictature avant de s’installer en France. L’Argentine pour Bejo et l’Espagne pour Larrea. “On ne réalise pas à quel point c’est difficile d’abandonner un pays”, souligne Bérénice Bejo.
“La France doit être fière des gens qu’elle a accueillis”
Née en Argentine avant de s’établir en France, Bérénice Bejo évoque avec émotion l’importance de la coexistence. pic.twitter.com/XafyUNQ3tD
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Née à Buenos Aires, elle a déménagé en France avec ses parents à trois ans. “La France est un pays d’accueil qui doit être fière des personnes qu’elle a accueillies.” Elle ressent une gratitude particulière pour l’Hexagone, un aspect que ce rôle sur mesure lui permet d’explorer en profondeur : “Chaque soir, quand je déclare que je suis ici chez moi, c’est comme si je souhaitais transmettre un message aux 300 personnes dans la salle.”
“Agence Tourisme” : la série originale produite par CANAL+
Bérénice Bejo est rejointe en seconde partie d’émission par Sébastien Thoen. Le comédien vient présenter sa nouvelle série “L’Agence Tourisme” avec Baptiste Lecaplain et Gérard Jugnot. Cet émission, présentée comme un magazine de voyage, propose une sélection d’activités inédites à réaliser dans plusieurs villes d’Europe. L’humour y occupe une place centrale, et Sébastien Thoen suggère “un week-end de rupture amoureuse à Séville, par exemple.” Le chroniqueur se réjouit particulièrement de travailler avec ses deux camarades ; Baptiste Lecaplain, qu’il connaît depuis longtemps, et Gérard Jugnot, qu’il considère comme “le Père Fouras de la comédie.”
Bérénice Bejo se produit au Théâtre Marigny jusqu’au 22 décembre et “L’Agence Tourisme” sera disponible à partir du 23 novembre sur CANAL+.
L’entretien avec Bérénice Bejo et Sébastien Thoen est accessible en replay sur MyCANAL.
Bérénice Bejo et Sébastien Thoen sont les invités de Clique, ce soir à 23H sur CANAL+.
L’actrice du succès mondial “Sous la Seine” présente son seul en scène “Les gens de Bilbao naissent où ils veulent”. Sébastien Thoen est dans “L’Agence Tourisme”, alliant tourisme et humour. pic.twitter.com/yjBGZ0TZST
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La première saison de ‘Bad Sisters’ était une histoire complète basée sur la série limitée belge, ‘Clan’. Après son immense succès, Sharon Horgan avait une vision de la façon dont cela pourrait continuer. Le casting star nous raconte comment sa vision a pris forme.
Voici ce que font les magnats de la Silicon Valley pour vaincre la mort.
Dans le premier numéro de la nouvelle rubrique de conseils en IA de WIRED intitulée « The Prompt », nous répondons aux questions sur la capacité de l’IA à changer votre corps et votre capacité à changer l’impact environnemental de l’IA.
Google a lancé une application autonome Gemini pour l’iPhone.
« Nous sommes en direct de la salle de sport pour réaliser la séance Women édition. » Le Raptor – précédemment connu sous le nom de Raptor Dissident, de son vrai nom Ismaïl Ouslimani – fait le beau sur une plage des Maldives. « Le cadre est somptueux ! » Dans cette vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, le vidéaste comptant 750k abonnés sur YouTube promeut activement son programme de remise en forme : Zero to Hero. L’ancien acolyte de l’antisémite Alain Soral et vétéran de la fachosphère s’efforce depuis quelque temps de se réinventer en tant que coach sportif et en nutrition. Il filme sa compagne, casquette rose sur la tête : Betty Autier, 1,2 million d’abonnés sur Instagram, en pleine séance d’exercice. Une publicité pour le moins inattendue venant de cette pionnière du blogging des années 2000.
Depuis plusieurs années, les deux influenceurs affichent leur amour au grand jour. /
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Depuis plusieurs années, les deux influenceurs exposent leur amour au grand jour sur les réseaux. Désormais, Betty Autier joue même le rôle d’égérie : depuis janvier 2024, elle met en avant une story sur son compte Instagram pour vanter les qualités de « Raptor Nutrition », la marque de compléments alimentaires de son partenaire. La créatrice de contenu propose aussi un code promo à son nom. « De ma compagne, j’attends une relation de conseil… réfléchie », explique Le Raptor dans l’émission à succès sur l’actualité entrepreneuriale Sans permission, diffusée le 5 septembre 2024 :
« Elle m’a soutenu dans mes entreprises, dans ma façon de communiquer. J’attends d’elle qu’elle soit une femme et une mère à part entière. »
Le Raptor, youtubeur emblématique de l’extrême droite, est conseillé par sa femme, Betty Autier. /
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Betty Autier a toujours cultivé une image de it-girl accessible, pétillante et sans drame. Cette stratégie lui a permis de se frayer un chemin jusqu’aux zones VIP des défilés de mode et de signer des contrats à 500.000 euros avec des marques de luxe prestigieuses. Son unique combat a peut-être été de dénoncer dans son autobiographie le body shaming dont elle a été la cible, ainsi que de parler de ses troubles alimentaires. Le Raptor, quant à lui, s’est imposé comme le porte-voix de la fachosphère sous couvert d’humour. Il a attiré l’attention en 2015 pour ses attaques contre les luttes antiracistes, ses remarques misogynes et ses injures. En 2018, il co-fonde avec le vidéaste d’extrême droite Papacito le groupuscule Vengeance Patriote, cherchant à former ses militants au combat et à la gestion des armes, comme l’a rapporté StreetPress en 2020. « Dans l’entourage de Betty, il doit y avoir des homosexuels, et le féminisme doit être bien perçu, ce n’est pas très bon pour son entreprise », interpelle l’antisémite Alain Soral dans une vidéo d’août 2018, énième épisode du clash Internet entre lui et Le Raptor.
À LIRE AUSSI : Vengeance Patriote, le groupe d’extrême droite qui forme ses partisans pour le combat
Betty Autier fait la promotion des compléments alimentaires Raptor Nutrition. /
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La romance entre la modeuse et le leader de la virilosphère aurait débuté vers 2017. D’abord discrets, ils apparaissent ensemble depuis 2020. On les aperçoit notamment à Venise, posant en tenue de bal de style renaissance italienne. « Un couple au sommet de l’Olympe », « un couple royal », commentent plusieurs internautes. Le duo met même en scène ses deux chiens Shar Pei. Bien que Le Raptor cherche à se donner une image glamour, ses positions réactionnaires demeurent présentes. Un exemple étant une photo d’un des chiens publiée au début de leur relation, où le chiot est dans les bras d’Henry de Lesquen, un défenseur du négationnisme et un adversaire de « la musique nègre ». En légende, Le Raptor précise que le toutou est « adoubé » par l’ancien président du média d’extrême droite Radio Courtoisie. « Peux-tu en dire autant ? », termine-t-il, avec sa question rhétorique signature.
Dans la famille Dissident : Betty Autier, Le Raptor, leur petit garçon et leurs Shar Pei. /
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En septembre, Le Raptor a même marqué son retour sur la toile avec une vidéo complotiste : « Pour détruire l’arnaque climatique », qui a suscité près de 800.000 vues. « Vous êtes la proie d’une manipulation mondiale », déclare-t-il :
« [Les influenceurs] ne s’exposent pas beaucoup aux risques en choisissant le camp de la propagande pour espérer capter l’attention d’un public composé de personnes vulnérables (…) c’est-à-dire de femmes avec des problèmes familiaux sous anxiolytiques et de geeks qui espèrent séduire en adoptant les mêmes idées que les femmes au profil psychologique douteux. »
Betty Autier réagit avec un emoji rockstar : la main avec l’index et l’auriculaire levés. Et peu importe les contradictions ! Végétarienne pendant environ vingt ans – aujourd’hui convertie – elle a lancé en décembre 2022 une marque de cosmétiques « cruelty free », qui exclut les tests sur animaux. Elle propose également un masque « en fibre 100% naturelle et biodégradable ». L’influenceuse a aussi ajouté un emoji « poignée de main » sur le post annonçant début novembre le nouveau format vidéo du Raptor et de son partenaire Papacito, intitulé : « On explose les grandes sagas du cinéma. »
Betty a lancé des cosmétiques « cruelty free », tandis que Le Raptor adopte une position climatosceptique.
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Au cours de ce face-à-face, Le Raptor cible la militante et vidéaste Marion Seclin, une de ses cibles favorites parmi les féministes, qui selon lui, portent une lourde responsabilité dans le déclin masculin. Il en profite pour complimenter sa femme, qui semble vouloir se distancer de ces luttes politiques :
« Par le passé, les féministes voulaient devenir des blogueuses. Elles n’ont pas connu le succès escompté et donc elles qualifiaient de superficielles les femmes ayant réussi à créer une communauté parce qu’elles avaient bon goût. Prenons l’exemple de Betty : elle, elle avait du goût pour la mode (…) Elle m’a fourni des informations, j’ai deux ou trois noms de mécontentes bien connues. »
Pas de quoi ternir l’image de Betty Autier. La fashion victim a établi plusieurs partenariats avec des marques renommées : les cosmétiques Bourjois, les cafés L’Or Espresso ou les chaussures Vanessa Wu. En 2019, elle a même reçu en cadeau de la prestigieuse chaîne d’hôtels Sofitel un séjour à Rome, qu’elle a partagé avec son partenaire. Plus récemment, en 2023, la famille s’est vu offrir une suite par l’établissement 5 étoiles le Saint Régis, à Florence. L’équipe hôtelière a décoré la chambre avec des ballons dorés, des photos imprimées de la petite famille et des stickers Zero to Hero, la marque du Raptor. « Ce sont des attentions qui font vraiment plaisir », s’émerveille l’influenceur tout en visitant les lieux, conquis par cette nouvelle notoriété. Il s’extasie devant des meubles en cuir d’une marque de luxe :
« Si vous ne connaissiez pas, n’ayez aucune honte, moi je ne connaissais pas avant, c’est Betty qui m’a un peu ouvert les yeux sur ce monde-là. »
Betty Autier a établi des partenariats avec Bourjois, L’Or Espresso, Vanessa Wu, Accor, Marriott… /
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Depuis deux ans, le couple se consacre à une mini-série de vlogs lifestyle, bien éloignée des habitudes du Raptor : une escapade à la plage de Palombaggia en Corse, la visite d’une villa louée avec quelques amis à Hyères (83), la découverte de leur nouvelle propriété à Florence en Italie, suivie de leur achat à Kéa, en Grèce. Devant le miroir de leur dressing, le vidéaste commente avec soin ses costumes, tandis que sa compagne s’applique à lisser ses cheveux. Lui, en chemise en lin et mocassins en daim, elle, dans une robe en satin et des sandales avec des froufrous roses. Il demande même à ses abonnés de voter pour classer ses tenues préférées. Imposant ainsi un « art de vivre » à la sauce masculiniste, qu’il précise dans une de ses vidéos de coaching :
« Avoir une apparence esthétique est un atout inestimable qui élève nos standards et nos résultats dans tous les domaines de la vie. Que ce soit la posture, la confiance en soi, notre allure plus masculine et plus puissante génère davantage de respect et d’attraction. (…) Nous établissons des relations sociales de meilleure qualité, nos relations amoureuses s’épanouissent. »
Quand le monde de la mode et l’extrême droite se côtoient harmonieusement. /
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Au-delà des vêtements, Le Raptor tisse à travers ses publications un discours sur le modèle familial traditionnel. « La cellule familiale est le pilier d’une nation », déclare-t-il dans l’émission Sans permission. « Je suis le chef de la famille », rappelle-t-il également dans une story à Londres en juin 2023, avec Betty Autier souriante derrière lui. Dans la légende d’une photo où il pose avec son enfant, il écrit :
« Laisse un cœur rouge si tu envies mon porte-bébé de hippie asthmatique. »
Le Raptor défend à travers ses posts l’idée d’une famille traditionnelle. /
Crédits : DR
Pour Betty Autier, les répercussions de cette relation sont moins reluisantes. Elle a régulièrement été la cible de commentaires d’incels, des hommes qui adhèrent à la vision masculiniste de son partenaire. Sur le forum Blabla 18-25 ans de jeuxvideo.com, antichambre de la manosphère, elle est qualifiée de différents termes misogynes concernant son physique. Sur les réseaux sociaux, l’influenceuse a également subi de violents attacks de harcèlement après son accouchement en 2020. Elle réagit quelques jours après :
« J’ai tout de même réussi à encaisser quelques commentaires désobligeants (…) sur ma prétendue chirurgie esthétique ratée. Je ne suis pas du genre à répondre à ce genre de choses, mais c’est quoi ce délire ? Je suis juste une femme qui vient d’accoucher, avec les yeux rouges et le visage irrité par des larmes salées. Lui [Le Raptor] m’a pourtant trouvée belle toute cette journée-là. »
Les marques Vanessa Wu, Bourjois, les hôtels Sofitel et Saint Régis n’ont pas répondu à nos demandes. Nous avons été dans l’impossibilité de joindre le service presse de L’Or Espresso.
Ni Betty Autier ni Ismaïl Ouslimani n’ont répondu à nos sollicitations d’interviews.
Illustration de Une : Caroline Varon
À mesure que l’intelligence artificielle se développe de façon exponentielle, les deepfakes IA commencent à envahir le web. Cela signifie que vous et moi, nous sommes des cibles vulnérables pour le deepfake porn. Et même si vous n’avez jamais partagé de photos dénudées, une simple image de votre visage peut suffire à générer un contenu pour adulte.
Je ne sais pas si vous vous en souvenez, mais Taylor Swift a récemment été la cible d’un deepfake porn.
Et c’est ce que nous cherchons tous à éviter. Cependant, il existe des solutions pour nous défendre contre cette forme d’agression.
Je n’ose même pas envisager à quel point c’est traumatisant d’être pris au piège du deepfake porn.
Pour Me Goldberge, fondatrice du cabinet new-yorkais CA Goldberg Law, qui est spécialisée dans la défense des victimes de crimes sexuels et de cyberharcèlement, être une victime d’un deepfake porn est une épreuve particulièrement douloureuse.
Mais la situation devient encore plus désastreuse lorsque les victimes sont jeunes. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’elles sont souvent désemparées face à l’immensité et la complexité d’Internet.
De plus, la plupart des victimes de deepfakes porn ignorent comment réagir ou vers qui se tourner pour recevoir de l’aide.
Cependant, nous avons la possibilité de nous défendre contre cette forme d’intimidation et d’agression personnelle.
C’est du moins ce qu’a expliqué Goldberg lors d’une interview à l’occasion de la sortie d’un podcast de CNN concernant les Conditions d’utilisation de l’IA.
Les « Conditions d’utilisation » visent à clarifier ce qui est permis ou interdit en matière d’utilisation de la technologie d’intelligence artificielle.
Du côté des victimes, le premier réflexe à adopter consiste à prendre des captures d’écran des images ou vidéos deepfakes.
Sinon, il est également possible de demander la suppression du contenu. Mais il faudra remplir un formulaire sur Google, Snapchat et Meta, entre autres.
Il existe aussi d’autres organisations non lucratives qui accompagnent les victimes de deepfakes porn en leur proposant de faire retirer tout le contenu.
Il s’agit surtout de Take it Down et StopNCII.org qui se concentrent sur l’abus d’images intimes non consensuelles.
Cependant, ces deux organisations ne collaborent pas forcément avec toutes les plateformes de contenu NSFW.
La problématique des deepfakes porn et des images explicites non consensuelles a réussi à établir un consensus politique entre les partis.
Une audience au Capitole a permis à des adolescents victimes et à leurs parents de partager leurs témoignages sur l’impact de la pornographie générée par l’intelligence artificielle.
À la suite de ces témoignages, une initiative législative bipartisane a vu le jour. Le sénateur républicain Ted Cruz, avec le soutien de la sénatrice démocrate Amy Klobuchar, a proposé un projet de loi visant à pénaliser la diffusion de telles images.
The largest and most popular deepfake porn site, which gets millions of hits each month, is now inaccessible in the UK after the Government’s announcement this week that it will criminalise the creation of deepfake porn. What a win! 💪 pic.twitter.com/IIpiImxFfz
— Jess Davies (@_JessicaDavies) April 19, 2024
Le texte prévoit également d’imposer aux plateformes de médias sociaux l’obligation de retirer rapidement ces contenus dès qu’une victime les signale.
Toutefois, actuellement, les victimes font encore face à une situation juridique complexe et hétérogène, avec des lois variant d’un État à l’autre.
Dans certaines juridictions, il existe un vide juridique préoccupant. Aucune législation pénale ne protège cependant les adultes contre la création ou la diffusion de deepfakes porn.
En revanche, les mineurs sont protégés par les lois existantes sur l’exploitation sexuelle des enfants concernant les images sexuelles générées par IA les impliquant.
Cela dit, nous ne sommes pas véritablement à l’abri des deepfakes porn. De plus, nous ne pouvons pas grand-chose pour prévenir le pire, pour le moment.
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