On est tous le complotiste de quelqu’un
Dans mon modeste parcours de (relatif) jeune journaliste, un des principes directeurs que j’ai réussi à retenir concernant mon métier était qu’il fallait éviter de surplomber son sujet. Le risque non négligeable étant bien souvent de donner l’impression au lecteur que c’est lui qu’on surplombe, ce dernier peut ainsi se retrouver aisément avec le fâcheux sentiment d’être pris un con. Durant mes années de formation, j’ai pu également me rendre compte que le traitement de l’information résultait d’un choix éditorial délibéré, que l’information se devait d’être hiérarchisée, coupée, discutée de façon collégiale – comme par exemple, en évitant de repêcher la première vidéo virale sans intérêt ni fondement scientifique venue, afin de ne pas gonfler sa visibilité, et donc d’une certaine manière la légitimer. Normalement là vous devriez avoir compris où je voulais en venir. Sauf si vous êtes complètement idiots – ou juste fans de Hold Up. Lorsque j’ai découvert le documentaire suscité donc, délirante (mais surtout interminable) « enquête journalistique » de 2h40 censée apporter les réponses aux questions en suspens de la gestion du Covid-19 en suggérant l’existence d’un complot du forum économique mondial de Davos visant à euthanasier tous les nécessiteux à coups de vaccins mortels, j’ai, dans un premier temps et sans doute un peu naïvement, considéré qu’il valait mieux renvoyer ces thèses foireuses d’où elles venaient : les égouts. Personne n’a jamais pris au sérieux les blagues apocalypto-cosmiques de Sylvain Durif, alors pourquoi on commencerait aujourd’hui ? Et puis je me suis souvenu qu’aujourd’hui l’information circulait exclusivement à travers le coup d’éclat/indignation à durée de vie limitée propre aux réseaux sociaux, que la plupart des journalistes faisaient leur veille à partir des trending topics du moment sur Twitter, et que la ligne éditoriale de la majorité des médias était inféodée à la dictature du mot-clé via l’algorithme de…