Avec Eloi, la musique de chambre d’ado ne s’est jamais aussi bien portée
Eloi est d’une génération où les chambres d’adolescents sont des portails vers des ailleurs presque palpables. C’est là qu’il faut se rendre pour retrouver, semées un peu partout entre les lattes du parquet ou parmi les moutons de poussière, les graines des fleurs qui l’obsèdent et tapissent sa musique. Qu’obtient-on quand on bricole ses chansons dans une machine à voyager dans le temps ? Une matière si hybride et anachronique qu’elle a tendance à dérouter ceux qui se risquent à la décrire trop rapidement. Hyperpop ? Futurpop ? Non, la musique d’Eloi est l’essence du présent, comme si elle avait passé nos cerveaux sur-stimulés au microscope et s’amusait, en grossissant ou rétrécissant les lentilles, à jouer avec nos perceptions du réel. Le texte est vif, poétique. Il charrie une violence enfantine qui caresse plus qu’elle ne blesse. L’instru’ s’étire comme un vieux souvenir flou, haché menu en relents de raves qui n’ont encore jamais eu lieu. Eurodance, techno, gabber sont autant de termes qui se périment instantanément au contact de ses doigts. Alors, d’où viennent ces morceaux étranges qui font sauter les branches de l’arbre généalogique de la musique ? Née en 1998, d’un père compositeur/interprète et d’une mère productrice de cinéma, Eloi grandit naturellement au cœur de remous artistiques divers, qu’ils émanent de comédies musicales vues en primaire ou de cours de piano classique enseignés religieusement par sa grand-mère pendant dix ans. Si Schubert entonne sa sonate dans le salon, la chambre d’enfant est, alors, un refuge pour la fan de pop stars qui sommeille en elle. Entre les murs couverts de posters des idoles pour jeunes filles du début des années 2000, les mp3 de Christina Aguilera et Beyonce crachent leurs tubes addictifs. Enfant modèle, petite poupée sage, élève exemplaire, Eloi finit forcément par vouloir en découdre avec…