Le nébuleux destin du « cuisinier » de Vladimir Poutine
Lundi 7 février à Moscou, Emmanuel Macron et Vladimir Poutine sont assis à chaque extrémité d’une table démesurément longue. Au menu, des pommes trempées aux langoustines, des raviolis aux épinards, une soupe aux cinq espèces de poisson, un steak d’esturgeon au ptitim, de la viande de renne accompagnée de patates douces et cinq heures de discussion autour de l’inquiétante concentration de troupes aux frontières de l’Ukraine. Ce n’est pas le seul point de tension entre les deux chefs d’États. Au Mali, la présence de mercenaires russes conjuguée au retrait progressif des forces françaises de l’opération Barkhane a déclenché une crise diplomatique entre Paris et Bamako. Une pique lancée par Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, à l’encontre de la « junte illégitime » au pouvoir s’est soldée par le rapatriement de l’ambassadeur Joël Meyer dans l’Hexagone. Au-dessus de ces barbouzes, que les observateurs occidentaux associent au groupe Wagner, plane l’ombre du Kremlin. Ironie de l’histoire, c’est en Ukraine que le nom de cette organisation paramilitaire est documenté pour la première fois. Lors de l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, les deux camps s’accusent mutuellement d’avoir recours à des mercenaires – d’un côté pour mener le combat aux côtés des forces séparatistes, de l’autre pour réprimer des manifestations pro-russes. « L’Ukraine est l’acte fondateur du groupe Wagner », assure Sergey Sukhankin, chercheur à la Jamestown Foundation cité par Foreign Policy. Malgré l’opacité qui l’entoure, le groupe bouscule les définitions conventionnelles des entrepreneurs militaires privés type Blackwater (devenu depuis Academi). Wagner se détache autant par la diversification de ses activités, allant du mercenariat classique à l’extraction de ressources naturelles en passant par la diffusion de fausses informations, que par son leitmotiv : remplir les objectifs de la politique extérieure russe quoi qu’il en coûte. Officiellement, Moscou répète à qui veut l’entendre…