Moins d’un an après le procès pour meurtre du caporal Noyer lors duquel il a été condamné à 20 ans de réclusion, l’énigmatique Nordahl Lelandais est de nouveau présenté devant un tribunal, afin de répondre de la mort de la petite Maëlys De Araujo, enlevée et tuée lors d’un mariage en 2017 au Pont-de-Beauvoisin en Isère.
Cet ancien militaire de 38 ans est jugé devant la cour d’assises de l’Isère pour le meurtre précédé de l’enlèvement et de la séquestration de la fillette, qu’il a avoué avoir tuée “involontairement” en lui portant des coups très violents au visage. Il comparait aussi pour deux affaires d’agression sexuelles sur mineures révélées par l’examen de ses téléphones portables et de son ordinateur pendant l’enquête.
Si la mère de Maëlys va devoir faire face à une “terrible épreuve”, elle espère également que ce procès permettra d’éclaircir les nombreuses zones d’ombre qui entourent encore l’enlèvement et les dernières heures de sa fille. L’occasion aussi d’étudier l’énigmatique personnalité de Nordahl Lelandais, qui risque la réclusion criminelle à perpétuité.
“On a des doutes sur tout”
Entre sa disparition lors de la soirée du mariage le 27 août 2017, et la découverte du corps six mois plus tard dans le massif de la Chartreuse sur les indications du tueur, c’est un puzzle que les enquêteurs ont tenté de reconstituer. Mais celui-ci n’est pas complet et Nordahl Lelandais va être interrogé pour aider à le terminer.
“On a des doutes sur tout”, résumait au Parisien la mère de Maëlys, Jennifer De Araujo, le 25 janvier, quelques jours avant l’ouverture du procès. En effet, il faudra tenter d’éclaircir de nombreux points comme celui des circonstances exactes du décès de l’enfant, encore floues suites aux différentes versions données par Nordahl Lelandais depuis le début de l’affaire, en fonction des nouvelles découvertes des enquêteurs.
“On ne sait pas s’il l’a violée, de quoi elle est décédée, quels ont été les derniers mots qu’elle a prononcés… J’aimerais qu’il m’explique aussi comment il l’a convaincue de monter dans sa voiture. Le problème, c’est que, depuis le début, il nous balade. Il donnera sa version des faits et il faudra qu’on fasse avec”, développait dans cette même interview la mère de Maëlys, résumant ainsi une partie des points à mettre en lumière dans cette affaire hautement complexe.
D’autant plus que “la question d’un éventuel mobile sexuel se posera vraisemblablement” d’après Maître Fabien Rajon, qui défend notamment la mère et la sœur de la fillette. La pédocriminalité de l’accusé a en effet été confirmés depuis la découverte de vidéos dans son téléphone.
Il faudra aussi faire face à une inconnue de taille: la volonté de l’accusé de se livrer. Détenu à l’isolement au centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier en Isère, Nordahl Lelandais attendrait le procès “comme quelqu’un qui encourt la perpétuité”, selon une source proche du dossier. Une indication qui pourrait laisser craindre qu’il puisse finalement se terrer dans le silence, ayant déjà été condamné à 20 ans de réclusion pour meurtre sur le caporal Arthur Noyer en mai dernier.
Percer à jour Nordahl Lelandais
Dans ce procès aux fortes répercussions médiatiques, il sera aussi temps de faire la lumière sur le véritable profil de l’accusé. Parfois décrit comme un “tueur en série”, tantôt comme un prédateur ou un manipulateur, la personnalité de Nordahl Lelandais devrait faire l’objet de nombreux débats devant la cour d’assises.
MARIE WILLIAMS via AFP
L’ex-militaire pourrait permettre, s’il se livre entièrement, de mieux comprendre les motifs de son geste sur la fillette ce soir d’août 2017. Geste qu’il avait fini par avouer le 14 février 2018 après la découverte d’une goutte de sang dans sa voiture, près de six mois après le début de l’enquête. Acculé par les preuves accablantes, il avait lui-même conduit les enquêteurs jusqu’à l’emplacement de la dépouille de Maëlys dans un ravin escarpé du massif de la Chartreuse, à quelques kilomètres de son domicile.
S’il n’a jamais reconnu avoir tué intentionnellement Maëlys et abusé sexuellement d’elle, il a déjà confessé ressentir de l’attirance pour les petites filles “quand [il] étai[t] plus jeune”. Il avait dit cela au moment d’avouer l’agression sexuelle de deux de ses cousines, âgées de cinq et six ans. Ces faits seront au cœur du procès car il sera aussi jugé pour cela.
Ce procès devrait ainsi permettre de mieux comprendre son profil psychologique, encore bien mystérieux malgré le procès à Chambéry pour le meurtre d’Arthur Noyer en 2021, qui n’avait pas réellement permis de cerner l’homme.
Un profil singulier qui avait même conduit à la création d’une cellule spécialisée de la gendarmerie baptisée “Ariane” en janvier 2018 pour vérifier de possibles liens avec d’autres affaires. Mais faute de résultats, la cellule spécialisée avait finalement été dissoute en octobre 2020.
Les spéculations sur son possible parcours de “tueur en série” avaient pourtant permis de découvrir des liens avec la mort d’Arthur Noyer lors des investigations sur Maëlys. Mais pour Caroline Rémond, l’avocate de la famille de Maëlys, les mises en examen de Nordahl Lelandais pour le meurtre de Maëlys et d’Arthur Noyer “colorent un peu plus sa personnalité de prédateur sexuel plutôt que de tueur en série”, disait-elle dans L’Express en décembre 2018.
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