Les 120 évêques doivent adopter ces décisions lundi matin lors d’un vote à huis clos, en conclusion de plusieurs jours de travail. Un premier pas dans le processus de réparation a été franchi vendredi: sous la pression du rapport Sauvé et des associations de victimes, les 120 évêques ont reconnu “la responsabilité” de l’Église catholique dans les crimes sexuels commis par des prêtres et religieux et leur dimension “systémique” depuis 1950.
Cette réponse se veut “la traduction concrète” des 45 recommandations de la commission, a souligné devant la presse dimanche soir Mgr Luc Crépy, évêque de Versailles et président du Conseil de prévention et de lutte contre la pédophilie de la Conférence des évêques de France (CEF).
A Lourdes, les évêques ont planché sur plusieurs thèmes: “versement financier (aux victimes, ndlr) et financement” d’un fonds, “prévention et formation”, “gouvernance et contrôle”, “doctrine, droit canonique et justice” ou “responsabilité et reconnaissance”…
Mais le sujet le plus brûlant concerne l’indemnisation des victimes des religieux, dont les modalités, qui relèvent de l’Église de France et sont rapidement applicables, devraient être dévoilées. D’autres mesures nécessiteront du temps ou relèvent du Vatican.
Indemniser les 330.000 victimes
“Nous sommes dans la perspective d’un processus de réparation” avec “un travail d’accueil des personnes victimes, d’écoute, de reconnaissance de ce qu’elles ont subi, de médiation et de réparation, avec une dimension financière”, a expliqué à la presse Luc Crépy, évêque de Versailles et président du Conseil de prévention et de lutte contre la pédophilie de la Conférence des évêques de France (CEF).
L’indemnisation envisagée par les prélats devrait concerner les personnes victimes de faits prescrits mais pas seulement: toutes les demandes seront honorées, a assuré le porte-parole de la CEF, Hugues de Woillemont.
Comme annoncé en mars, une instance nationale indépendante instruira les demandes. Le nom de sa présidente – une femme magistrate spécialisée dans la protection de l’enfance, selon une source proche du dossier – doit être annoncé lundi. Elle composera ensuite sa commission.
Combien précisément feront la démarche ? Difficile de le dire. D’autant que si certaines victimes réclament une indemnisation pour pouvoir “se réparer”, d’autres – qui souvent ont rompu tout lien avec l’Eglise – n’en éprouvent pas le besoin.
Indemnisation individualisée
Un premier point est acquis: l’indemnisation sera individualisée. Les évêques sont d’accord pour examiner “les dégâts” causés chez chaque victime, affirme à l’AFP Mgr Luc Ravel, archevêque de Strasbourg.
Parmi les options étudiées figure, selon plusieurs sources, le modèle belge. Dans ce pays, “quatre niveaux d’indemnisation, allant de 2500 à 25.000 euros” ont été définis, a ainsi relevé le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (Ciase).
Les montants des indemnisations ne seront pas connus immédiatement. Ils devront en outre être harmonisés avec le dispositif mis en place pour les victimes de religieux de congrégations ou d’instituts. En mars, la CEF avait promis le versement des premières contributions financières en 2022.
Quels fonds pour indemniser?
Les évêques devront dire également si le fonds ad hoc, mis sur pied cet été, devra continuer à être abondé par les dons des fidèles, en plus des dons du clergé. À ce jour, ce fond a reçu quelques dizaines de milliers d’euros et espère atteindre dans un premier temps 5 millions. Selon une source interne à l’épiscopat, les évêques pourraient ne pas interdire les dons des fidèles, mais éviter d’en faire un appel public.
Toutefois, son utilisation va à l’encontre du rapport Sauvé qui recommande que les indemnisarions des victimes soient faites ”à partir du patrimoine des agresseurs et de l’Eglise de France” exclusivement. Le sujet divise au sein même de l’épiscopat: “Il faut que ce soit l’institution qui soit amputée, c’est une évidence pour moi”, affirme l’archevêque de Strasbourg Luc Ravel. Et “s’il faut vendre des biens immobiliers, on vendra”, affirme un autre évêque sous couvert de l’anonymat.
L’épiscopat réfléchit aussi à un “geste symbolique”, affirme Luc Ravel. “La question de vendre le bâtiment de la CEF (avenue de Breteuil à Paris, ndlr) a jailli”, a-t-il ajouté, sans autre détail.
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