« Je cherche aussi un plan.
– Tu vis à Thionville même ?
– Non, Sérémange.
– C’est pas loin…
– On peut aller chez toi ?
– Oui. Je peux venir te chercher et je te ramène.
– OK. T’aimes faire quoi avec un gars ?
– Me faire sucer, sodomiser et dominer. »
Leur conversation s’arrêta à 15H30 sur la promesse d’une rencontre imminente.
C’est son ex-compagnon, Xavier, qui a donné l’alerte le premier. Depuis leur séparation, en 2005, Xavier et Antoine M. ont gardé de bons rapports. Ils s’appellent pour Noël, se souhaitent leurs anniversaires ou juste comme ça, pour se donner des nouvelles. Quand le vendredi 1er février 2013, le jour de ses cinquante ans, Antoine M. ne décroche pas le téléphone, tout de suite, Xavier a un mauvais pressentiment. Il appelle la mère de son ex. Celle-ci n’a pas vu son fils depuis des semaines. Il appelle la mairie de Thionville (Moselle). Antoine M. ne s’est pas rendu à son travail depuis le 16 décembre. Comment ont-ils pu ne pas s’inquiéter plus tôt ? De son côté, Xavier n’hésite plus une seule seconde : son troisième coup de fil est pour les services de police.
En fin d’après-midi, dans un appartement du 8 rue Chateaubriand, à Thionville, le corps sans vie d’Antoine M. est découvert par le SAMU. Il est nu, sur le lit, partiellement enroulé dans une couverture rouge, un T-shirt relevé sur la moitié du dos et une paire de baskets de marque Nike aux pieds. Sur la table de chevet, une bouteille de lubrifiant et un flacon de poppers. Malgré l’état de putréfaction avancée du corps permettant aux pompiers d’affirmer qu’il est décédé depuis quatre à six semaines, ces derniers relèvent que de nombreux coups de couteau ont été assénés à Antoine M. Seize au total.
***
Ses amis, ses proches, ses collègues, tous l’appelaient « Tony » plutôt qu’Antoine, un surnom qui rappelait les origines italiennes de ses parents, enfants de la région des Abruzzes, connue pour ses montagnes et villages médiévaux, bordée par la mer Adriatique. Dans la famille M., Tony était le plus jeune de la fratrie et le préféré de sa mamma. Financièrement, elle a toujours favorisé son cadet qui ne vivait que pour sa passion : la musique. Dans les années 80, Tony était leader et chanteur dans un groupe de rock qui se produisait dans les bars et les salles de concerts entre Thionville et Hayange. Avec sa belle gueule, l’écorché vif avait du succès. Mais ce sont les hommes qui lui plaisaient. D’ailleurs, très tôt et partout où il allait, Tony a assumé son homosexualité. Au club de foot de la banlieue de Thionville, où il était entraineur sur son temps libre, un jeune homme avec qui il s’était lié d’amitié se souvient : « Dès son arrivée, Tony a dit qu’il était gay. Il a demandé si ça posait un problème à quelqu’un ou à nos parents. Il ne voulait pas d’ambiguïté. »
Ceux qui le fréquentaient savaient que Tony avait une sexualité assez libérée. Avec des délires intimes un peu particuliers. Cela avait commencé alors qu’il était en couple avec Xavier. Ensemble depuis 1997, leurs rapports sexuels avaient toujours été normaux jusqu’à ce que Tony se mette à aimer sniffer ses baskets. Un trip qui n’était pas du tout du goût de son compagnon. Séparé de Xavier en 2005, le garçon avait continué ses « plan ‘sket » en lien avec les odeurs de vestiaires. Sa préférence allait pour des baskets de la marque Nike. Et des Air Max Plus TN tant qu’à faire. Les fameuses « Requin » aux dégradés de couleur, pour les connaisseurs.
Puis, de libérée, sa sexualité était passée à débridée : tourner dans des pornos, enchainer les partenaires comme les plans à trois ou à quatre, Antoine M. s’en donnait à cœur joie. Aussi, il aimait fréquenter des hommes jeunes, beaucoup plus jeunes que lui. À ses jeunes amants il écrivait : « Je serai ta te-pu dans mes TN », quand il ne leur prodiguait pas des conseils du genre : « Le bandage, faut manger avant. Sinon tu tiens pas, c’est comme un match de foot : tu peux pas courir 90 minutes si t’as rien dans le ventre. » Son ordinateur, riche en données sur ses conquêtes, aurait fait rougir Grindr. À l’intérieur, des tableaux Excel où il classait ses nombreux partenaires sexuels en plusieurs catégories et listes : les « cute boys », les « best friends for sex », ou les « sex only ». A côté des initiales de leurs prénoms, des précisions sur leurs talents ou particularités comme « escorte Metz actif », « hard Yutz » (du nom d’une ville voisine de Thionville) ou « TTBM » pour Très Très Bien Monté.
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Dans les jours qui suivent la découverte du corps d’Antoine M., les enquêteurs de la police judiciaire procèdent aux diligences immédiates qui s’imposent en matière criminelle : autopsie, perquisition, enquête de voisinage, d’environnement, audition des proches de la victime et exploitation de son téléphone comme de son ordinateur.
En raison de l’état de putréfaction avancée du corps, le médecin légiste pouvait affirmer que le décès d’Antoine M. remontait au moins à trois semaines mais sans plus de précision. Cela pouvait être plus. Difficile à dire. Ce qui était certain c’est qu’Antoine M. avait été frappé seize fois par un objet tranchant au niveau du cou, du tronc et du dos. S’il était impossible de prouver la chronologie des coups portés, le légiste était formel : c’est la section de la moelle épinière qui avait provoqué un décès quasi instantané. Si la recherche cutanée permettant d’observer d’éventuelles traces de lutte était rendue difficile voire impossible du fait de la coloration noirâtre du corps, il était certain que le meurtrier devait être relativement costaud, certaines vertèbres de la victime ayant été fracturées.
Ainsi incapables d’être sûrs du jour exact où Antoine M. s’est vu ôter la vie, les enquêteurs misent sur un faisceau d’indices matériels plus ou moins fiables. Dans un premier temps, le courrier dans la boîte aux lettres leur indique que celle-ci n’a pas été relevée depuis plusieurs semaines, la lettre la plus ancienne datant du 19 décembre 2012 et les autres se suivant de façon linéaire jusqu’au 1er février 2013, jour de la macabre découverte. L’exploitation du téléphone, de l’ordinateur ainsi que de la carte bancaire de la victime permettent de situer sa mort numérique autour du 14 décembre. Après cette date, il n’y a plus de signe d’Antoine M.
« La dernière fois qu’on s’est parlé, il m’a confié vouloir retourner vivre chez maman, car il se sentait menacé »
À la mairie de Thionville, Antoine M. travaillait comme ingé son pour le théâtre municipal. Le vendredi 14 décembre à 17h44, l’établissement a tenté d’appeler son technicien, en vain. Ses collègues racontent aux enquêteurs que Tony se vantait d’avoir un nouveau mec et montrait aux curieux l’heureux élu dont il gardait une photo d’identité, soigneusement rangé dans son portefeuille. Sur son compte Facebook, il avait même publié un cliché du garçon en question. Sur l’image en noir et blanc postée sur le réseau social figurait un beau mec, sculpté tel un Apollon dans un survêtement Lacoste, avec comme légende « Charles, mon nouveau mec. »
Alors les enquêteurs rappellent Xavier, l’ex-compagnon, le confident de toujours. La dernière fois qu’il a eu Tony au téléphone c’était le 11 décembre 2012. Il ne l’a jamais entendu prononcer le prénom Charles. Sur le moment peut-être n’a-t-il pas trop fait attention ? Toutefois il est certain que Tony lui, « a dit qu’il avait rencontré quelqu’un » mais aussi qu’il « avait peur ». S’en voulant, il se souvient : « Il n’était pas comme d’habitude, je l’ai senti triste et stressé. » Interrogé à son tour, le frère de Tony confirme : « La dernière fois qu’on s’est parlé, il m’a confié vouloir retourner vivre chez maman, car il se sentait menacé. »
Passée au peigne fin, la scène de crime révèle aux enquêteurs la présence de plusieurs ADN – en plus de celui d’Antoine M. Sur le short rouge, le flacon de poppers, la taie d’oreiller, les draps ainsi que la paire de baskets trouvée aux pieds de la victime : X1. Dans le cendrier, 5 mégots ont été touchés par Antoine M., un sixième par X2. X3 a pris en main un sachet de cannabis quand X4 a utilisé une fourchette. X5 n’est pas rentré dans l’appartement, il s’est contenté de déchirer un chèque retrouvé dans la voiture de la victime. Qui sont-ils ? Charles ? Et les autres ? Des amants ? Des amis ? Doucement, les enquêteurs vont remonter le fil.
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Le 15 avril 2013, soit quatre mois après le meurtre d’Antoine M., un certain Julien F. est placé en garde à vue dans les locaux du commissariat de Metz. Le garçon de 18 ans a été confondu grâce à son adresse IP lors de l’exploitation de l’ordinateur de la victime et de son téléphone : Julien F. serait la dernière personne à être entrée en contact numérique avec Tony. Quand les policiers lui demandent si le pseudo « Julien57 » lui dit quelque chose, celui-ci leur répond que non. GayPax ? Pareil, c’est la première fois qu’il en entend parler. Et coucher avec des hommes ? Jamais !
Passées les premières heures de garde-à-vue et le traditionnel procès-verbal de chique – où les enquêteurs acquiescent sans sourciller aux mensonges du gardé-à-vue avant de lui mettre le nez dans ses contradictions -, Julien F. finit par reconnaître que, oui, le 14 décembre 2012, il est « allé chez un fétichiste de Thionville. » S’il lui a bien « fait miroiter une relation sexuelle » c’était « uniquement dans le but de le voler. » À l’époque Julien F. avait des ennuis, « une dette de stups à rembourser qui devenait pressée. » Il avait « peur de finir dans un coffre », confie-t-il aux enquêteurs.
« Il n’a jamais eu un mot plus haut que l’autre, jamais une remarque agressive »
Comme en attestent leurs échanges sur GayPax, Tony et lui se sont retrouvés devant la pharmacie de Sérémange vers 15H45. Direction l’appartement rue Chateaubriand. À 16H08, le téléphone de Julien F. borne à Thionville. Pour les enquêteurs, jusque-là ça colle au niveau du timing. Arrivés à son domicile, dans la cuisine, Antoine M. leur sert deux verres de rhum, tandis que Julien F. fume une cigarette. C’est là qu’il « repère le portefeuille, posé sur la table ». Dans la chambre, alors qu’ils discutent assis sur le bord du lit, l’autre se met à lui « caresser la cuisse », explique Julien F. « C’est là que je me lève et que je lui dis que je vais me préparer, poursuit-il. Il m’indique où sont les WC et commence à se déshabiller. Moi, je fonce à la cuisine pour voler le portefeuille. L’autre me voit, me gueule après. Alors je m’enfuis en courant. Après ça je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais, à mon départ, il était vivant. »
Dans les locaux du commissariat de Metz, dans une salle voisine, la petite-amie de Julien F. et la mère de cette dernière sont également entendues. Le soir du 14 décembre, elles ont récupéré Julien F. vers 18h45 pour aller au McDo et se faire un ciné comme en atteste le paiement sur la carte bancaire de la maman à 19H22. Quand les policiers les informent de quoi Julien F. est accusé, toutes les deux tombent des nues. Ce soir-là, elles n’ont « rien remarqué de particulier. » Ni son comportement, ni ses vêtements. Ces derniers ne sont ni neufs, ni tâchés de sang. Comment ce « jeune homme sympa, discret et poli » en couple avec sa fille depuis trois ans peut-il être un meurtrier ? « Il n’a jamais eu un mot plus haut que l’autre, jamais une remarque agressive », se souvient la mère de famille qui l’a accueilli dans sa maison tous les weekends, sans exception. Elle qui trouvait leurs « conversations intéressantes » et lui reconnaissait même « une certaine culture », tremble à l’idée d’avoir peut-être fait « entrer le loup dans la bergerie. » Julien F. aurait-il pu tuer de sang-froid et pour la première fois un homme de seize coups de couteau dans le dos pour ensuite se taper un McDo puis un ciné avant de venir se glisser dans le lit de sa fille ?
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« Je suis un peu émue, veuillez m’excuser », chuchote Dominique G., 70 ans, à la barre de la cour d’assises de la Moselle. Depuis le 15 décembre 2021, la juridiction criminelle est chargée de juger celui que la justice accuse du meurtre d’Antoine M.
Dans le box des accusés : Julien F., s’accroche aux mots de sa grand-mère maternelle venue témoigner de qui il est. La première chose dont elle parle c’est de sa « gentillesse » et de sa « douceur ». Un garçon « intelligent », « très inquiet pour sa maman. » Retiré à la garde de sa mère à 11 ans, Julien F. est parti vivre chez son grand-père paternel. « Ma fille, ça ne me fait pas plaisir de le dire, mais elle était alcoolique, elle ne pouvait pas assumer. Elle recevait n’importe qui à la maison. » Les deux mamies se relaient comme elles peuvent pour combler l’absence maternelle auprès du petit Julien : « des weekends, des vacances et beaucoup de tendresse. » En 2009, alors qu’il a 15 ans, son père décède. « Son père, c’était son repère. À sa mort, Julien s’est renfermé sur lui ». Arrêt des études, pas d’emploi, consommation de drogues, le garçon sombre.
Mais les faits dont il est accusé, Dominique G. n’y croit pas : « Et je ne dis pas ça parce que je suis la grand-mère. Pour moi, il n’a pas pu faire ça. Julien c’est quelqu’un de maladroit. Je ne vois pas comment il peut évoluer sur une scène de crime. Et puis, il a son handicap. » Depuis l’adolescence, son petit-fils a des difficultés de marche, une mauvaise coordination et une incontinence urinaire qui l’oblige à utiliser une sonde. « Julien n’a jamais pu jouer au foot par exemple, explique-t-elle. Aussi, il est incapable de porter des charges lourdes. C’est quelqu’un de diminué physiquement. » Et puis, à Noël 2012, ils ont passé les fêtes ensemble, en famille. « Il n’avait pas un comportement anormal par rapport aux autres enfants. »
« La cuisine d’Antoine M. est une vraie coutellerie. Quand il retourne dans la chambre ce n’est pas pour du sexe mais pour le tuer »
Le ministère public, qui porte l’accusation pour les intérêts de la société, a d’autres éléments dans le sens de la culpabilité de Julien F. C’est ce qu’il entend développer dans son réquisitoire, le dernier jour du procès.
Déjà, les premiers mensonges aux enquêteurs sur le pseudo et l’homosexualité de l’accusé. « En 2012, Julien est un garçon qui se cherche, mal dans sa peau, avance-t-il. Alors qu’il est en couple avec une fille, on sait d’après son profil GayPax qu’il a des relations homosexuelles depuis juillet. » Mais le matin du 14 décembre, selon la thèse du ministère public, Julien F. « a besoin de fric. » Même si sa dette de stups n’est pas énorme, « dans son esprit les dealers ne sont pas des rigolos, il a peur. » Depuis qu’il consomme des drogues, il a déjà volé son grand-père pour 5000 euros, ce qui lui a valu une mention à son casier judiciaire, alors il se cherche un autre pigeon : Antoine M. tombe à point nommé. « À 16H10, alors qu’il est déjà en sa compagnie, on sait qu’il reçoit un SMS de son dealer. La pression est là. Il est acculé. Pour un gamin de 19 ans, sans parents, on peut imaginer que c’est difficile. De l’autre côté, sa petite amie lui écrit. On a calculé : 1 SMS toutes les six minutes. » Entre les deux, c’est effectivement une litanie de textos échangés sur toute la journée. » D’après l’exploitation de son ordinateur, Antoine M. lance le film porno sur un site de streaming à 16H15. « C’est là que Julien F. prend conscience des délires intimes de son hôte. Avant ça, il n’en avait pas idée. Dans son esprit c’est un taré, sa passion pour les baskets, il trouve ça dégueulasse, il l’a dit en garde-à-vue. Alors il retarde comme il peut l’échéance du rapport sexuel. Faire miroiter une relation pour voler quelqu’un, c’est plus facile à dire qu’à faire pour quelqu’un qui ne l’a jamais fait. Surtout quand à côté, l’autre qui a l’âge de son père commence à se déshabiller. » Alors le procureur imagine Julien F. déambuler jusqu’à la cuisine, se saisir du portefeuille et sa déception lorsqu’il l’ouvre : il n’y a que 40 euros dedans. Sa dette est de 160. « Sous la pression, il dégoupille, jubile le ministère public. La cuisine d’Antoine M. est une vraie coutellerie. Quand il retourne dans la chambre ce n’est pas pour du sexe mais pour le tuer. »
Pour preuve, le procureur avance les nombreux SMS envoyés par sa petite-amie restés sans réponse. À 16H52, 17H01, 17H07 et 17H21. « Au regard de leurs échanges sur la journée, ce trou de 29 minutes est un événement extraordinaire », pointe-t-il. Et puis aussi, « l’ordinateur d’Antoine M. éteint à 16H53 qui ne se rallumera plus jamais. » Pour lui, c’est « un crime de circonstances » lié à « une accumulation de pression ». Et après les 16 coups de couteau, un McDo et un ciné ? « Pourquoi pas, Julien F. a l’habitude de tout cloisonner. Il remet son masque après avoir dégoupillé. »
Le ministère public a requis une peine inférieure à 18 ans. En défense, Me Olivier Rondu, l’avocat de Julien F. tente de distiller le doute, espérant faire pencher l’intime conviction des jurés au bénéfice de l’accusé. Il pointe plusieurs choses. À commencer par l’absence de certitude quant au jour exact de la mort d’Antoine M. La mort numérique ? « Antoine M. pouvait ne pas utiliser son ordinateur, son portable ou sa carte bleue pendant plusieurs jours. Précisément, on ne peut pas dire que c’est le 14 décembre. Ça peut être le 15, le 16 ou le 17. » L’ordinateur éteint à 16H53 ? « Cela aurait été opportun que les enquêteurs analysent l’ADN sur le clavier ou la souris. Ça n’a pas été fait. Et mon client maintient qu’il ne l’a pas éteint. » L’arme du crime ? « Elle n’a jamais été retrouvée et Julien F. n’avait pas une goutte de sang sur lui. À 17H34, il écrit à sa grand-mère pour qu’elle vienne le récupérer à Thionville. Elle ne remarque rien. Pas plus que sa petite-amie et la mère de celle-ci. » Ses mensonges en garde-à-vue ? « Vous connaissez beaucoup de petits-fils qui racontent à leur grand-mère qu’ils couchent avec des hommes ? » La pression comme acte déclencheur ? « En neuf ans d’instruction, pas une reconstitution n’a été faite pour prouver que la scène imaginée par le ministère public était plausible. Pour rappel, messieurs et mesdames les jurés, Julien F. a été relâché en 2013 car il n’y avait pas assez d’éléments contre lui. Il a été laissé libre, alors qu’il était suspect principal dans une affaire de meurtre ! En sept années d’enquête supplémentaires, rien n’a été fait, rien n’a été prouvé ! » D’ailleurs, rare, l’expert psychologique qui s’est entretenu avec lui a convenu que Julien F. était « un jeune adulte qui n’avait pas de problèmes particuliers. » Le pénaliste invite les jurés à se pencher sur l’ADN X1 retrouvé dans l’appartement d’Antoine M. sur des éléments plus que troublants. « A ce jour, X1 n’a toujours pas été identifié. Or, les experts sont formels : Julien F. n’est pas X1, son profil ADN correspond à X2. Celui qui a touché un des mégots de cigarette dans le cendrier. » Pour l’avocat, « il est possible qu’après sa déconvenue avec Julien F., la victime ait éteint d’elle-même son ordinateur et soit ressortie pour ramasser un gigolo ou que quelqu’un qu’il connaissait ait toqué à sa porte après le départ de mon client. » Dans le box des accusés, Julien F. maintient qu’il n’est « pas un meurtrier ». « Cela aurait trop pesé sur ma conscience pour que je mente pendant tant d’années. »
À ce jour, le fameux « Charles » n’a jamais été retrouvé par les enquêteurs qui ont fouillé toutes les salles de sport de Thionville et de ses environs. Ces derniers sont arrivés à la conclusion qu’il s’agissait d’un amant imaginaire et que la photo en noir et blanc postée sur Facebook du beau gosse en survêtement Lacoste était une pub. « Sauf que, la mère d’Antoine M. maintient que son Tony le lui a présenté sur un parking et qu’il est même monté dans sa voiture. C’est dans la procédure. »
Le vendredi 17 décembre 2021, Julien F. a été condamné par la cour d’assises de la Moselle a vingt années de réclusion criminelle. Dès le lundi matin, son avocat a interjeté appel. Un deuxième procès devrait avoir lieu courant 2022.
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