« Ce vendredi 26 novembre, Uber quitte brutalement Bruxelles, laissant sur le carreau 2 000 travailleur·ses avec qui nous ne pouvons qu’être solidaires. Tou·tes ces “prestataires” qui se retrouvent coincé·es au bord de la route, déconnecté·es du jour au lendemain, sans autre forme de procès.
Comme plusieurs plateformes, Uber a fait fi de toutes lois depuis son implantation en Belgique. Alors, ne nous trompons pas de cible et n’inversons pas les rôles ! C’est bien Uber le responsable de cette situation, pas la loi. Uber qui, depuis le début, se dédouane de son rôle d’employeur, en imposant à ses chauffeur·ses, de même qu’à ses coursier·ses, un statut qui cumule les désavantages du salariat et de l’indépendance.
Et c’est bien ça, les dessous du modèle économique du capitalisme de plateforme : Uber s’implante subitement sur un territoire, crée le fait-accompli et exerce un chantage immonde sur les travailleur·ses. Et si, au bout d’un certain temps, la loi qu’il bafoue n’est pas modifiée pour aller dans son sens, il quitte la place et estime ne rien devoir à personne. L’essai tenté par Uber, en Belgique comme ailleurs, est donc bien d’entraîner la concurrence la plus déloyale (et illégale) possible, montant les travailleur·ses les un·es contre les autres et opposant ici chauffeur·ses de taxi contre chauffeur·ses Uber.
« Uber veut faire changer la loi, non pas pour qu’elle aille dans le sens de ses “prestataires” mais bien dans le sens de son modèle de régression sociale extrême. »
Ce ne sont pas les taxis le problème mais bien la plateforme hors-la-loi Uber. C’est à Uber de payer la casse, pas aux travailleur·ses qu’on a floué·es et à qui on a fait croire qu’il n’y avait aucun problème à ne pas respecter la loi, qu’on allait la faire changer.
On notera le cynisme absolu des déclarations d’Uber, s’inquiétant tout à coup de la rémunération de ses chauffeur·ses, alors qu’ils n’ont, jusqu’ici, jamais hésité à baisser unilatéralement et brutalement les tarifs à la course, et qu’ils ne font aucun cas du droit du travail et des droits fondamentaux.
Uber se plaint et veut faire changer la loi, non pas pour qu’elle aille dans le sens de ses “prestataires” mais bien dans le sens de son modèle de régression sociale extrême.
Par ailleurs, l’argument qu’utilise Uber et qui voudrait que la loi soit obsolète sous prétexte que les smartphones n’existaient pas lors de la rédaction de celle-ci n’est en aucun cas recevable. Le téléphone, le fax et les mails, “nouvelles” technologies à un moment donné de l’histoire, ont certes changé notre manière de travailler, mais n’ont en aucun cas changé la loi ou dégradé le statut des travailleur·ses pour les faire revenir à la “liberté d’esclave” du XIXème siècle, un modèle où toutes les contraintes sont supportées par les travailleur·ses et aucune par l’employeur.
Car c’est bien cela que nous vend Uber sous prétexte de modernité : la légalisation de pratiques sociales hors-la-loi pour appliquer son modèle de surexploitation salariale.
Modifier la loi pour aller dans le sens de Uber serait la porte ouverte et une injonction pour toutes les autres plateformes à ne pas la respecter. Alors ne nous trompons pas de cible, ce ne sont pas les symptômes qu’il faut traiter mais les causes ! Oui, soyons solidaires avec les travailleur·ses laissé·es sur le carreau, mais pas avec les plateformes qui continuent de bafouer la loi ! »
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