2023 est une année particulière pour Pinar Selek. La République de son pays natal fête ses 100 ans et la justice de cette dernière la persécute depuis 25 ans.
Sociologue et militante féministe et antimilitariste, Pinar Selek est poursuivie devant le tribunal d’Istanbul une cinquième fois pour un attentat imaginaire.
Arrêtée et emprisonnée en 1998 pour ses travaux sur la communauté kurde, elle apprend en prison être accusée d’être liée à une explosion qui venait de faire sept morts au bazar aux épices d’Istanbul. Le pouvoir décrit un attentat, la justice et les experts jugent qu’il s’agit d’un accident.
Pinar Selek est donc acquittée par quatre fois, en 2006, 2008, 2011, 2014.
Malgré cela, elle subie la torture et, depuis, une persécution psychologique.
La Cour suprême de Turquie annulant tout ses acquittements pour la traduire une cinquième fois devant les tribunaux en mars dernier. Et finalement le 29 septembre. Nous apprendrons ce jour-là, au lendemain de notre tournage (la veille, le 28 septembre), un nouveau report du procès… au 28 juin 2024.
En exil en France en 2011, Pinar Selek obtient la nationalité en 2017, mais cette dernière ne l’a protège pas entièrement. Désormais placée sous mandat d’arrêt international, Pinar Selek est aussi menacée de mort par l’extrême-droite turque et les Loups Gris, une mouvance ultranationaliste armée turque particulièrement active en Europe de l’Ouest.
Dans son dernier ouvrage, “Le chaudron militaire turc, un exemple de production de la violence masculin” (aux éditions Des Femmes, Antoinette Fouque), elle persiste et signe. Défiant la censure, elle revient sur ses recherches sociologiques débutées en 2007, pour les élargir au contexte mondial néolibéral actuel, compressé entre la montée des nationalismes, des autocraties et le retour des guerres de contact.