Parmi toutes les migrations existant à travers le règne animal, celle qu’effectuent les saumons est parmi les plus célèbres et les plus extrêmes. Voici pourquoi et comment les saumons remontent les rivières.
Les saumons migrent pour une raison bien spécifique : ils cherchent à déposer leurs œufs à l’endroit exact où ils sont eux-mêmes nés. Les scientifiques pensent qu’ils agissent ainsi, car leur propre existence indique que ce lieu de naissance est propice à la survie de jeunes saumons. Mais cela implique de remonter à contre-courant jusqu’à plusieurs milliers de kilomètres de rivière depuis l’océan et d’affronter les obstacles et les prédateurs.
Après avoir passé plusieurs années dans l’océan, où il est devenu suffisamment fort pour le voyage, le saumon entame sa migration, généralement entre septembre et novembre. Une espèce part de l’Atlantique vers l’intérieur des côtes nord-américaines et européennes et sept autres partent du Pacifique vers l’intérieur des cotes asiatiques et nord-américaines.
Pour le saumon, la première étape du voyage est de retrouver son estuaire d’origine, l’endroit où la rivière où il est né rejoint la mer. Pour cela, il utilise la magnétoréception : un sens qui lui permet de détecter le champ magnétique terrestre et de s’orienter en fonction. Une fois qu’il a réussi à retrouver et à rejoindre l’estuaire, le saumon est prêt à remonter la rivière.
Une migration qui implique des modifications physiques
Mais entre-temps, alors que le saumon se rapprochait de l’eau douce et que la salinité de l’eau chutait, son métabolisme et sa morphologie ont changé. Une partie de son énergie est désormais dédiée à la production d’œufs ou de sperme. La mâchoire du saumon mâle prend une forme de crochet et il gagne des dents pointues, pour défendre ses futurs petits. Chez certaines espèces, le mâle développe aussi des bosses sur le dos, afin de le rendre plus visible depuis la surface et que les prédateurs s’attaquent ainsi davantage aux mâles qu’aux saumons femelles, plus importantes pour la reproduction.
Enfin, son sens de l’odorat s’affine : c’est grâce à lui qu’il va retrouver son lieu de naissance. Car au moment où un saumon descend la rivière où il est né pour gagner l’océan, les odeurs de la rivière et de ses affluents s’impriment dans son cerveau. Il possède ainsi une « carte » d’odeurs qui lui permet de s’orienter en remontant la rivière. Mais c’est l’étape la plus dangereuse du voyage : le saumon cesse de se nourrir et avance sans s’arrêter.
Sur le chemin : des rapides et des chutes d’eau, que le saumon doit dépasser en faisant des bonds allant jusqu’à 3,5 mètres. Mais aussi des prédateurs, venus spécialement vers la rivière pour profiter de la migration des saumons : les ours. De nombreux saumons ne survivent donc pas au voyage.
Une fois arrivées, les femelles consacrent ce qui leur reste d’énergie à la construction de « nids » dans lesquels elles déposent leurs œufs que les mâles vont ensuite féconder. La plupart des saumons vont ensuite dépérir et mourir, un processus naturel après la reproduction. En se décomposant, leur corps va libérer des quantités importantes de nutriments, qui vont enrichir la rivière et ses alentours. Dans les nids, les œufs éclosent, libérant des petits qui vont devoir se débrouiller seuls pour grandir et rejoindre l’océan afin de recommencer le cycle.