Le gouvernement haïtien a convoqué l’ambassadeur de France dans le pays pour protester contre des commentaires « inamicaux et inappropriés » d’Emmanuel Macron, qui a été pris en caméra traitant les dirigeants du pays de « crétins ».

Le président français avait décrit mercredi la décision du conseil présidentiel transitoire du pays caribéen de destituer le Premier ministre plus tôt ce mois-ci, au milieu d’une escalade des violences des gangs, comme « complètement stupide ».

« Honnêtement, ce sont les Haïtiens qui ont tué Haïti en laissant entrer le trafic de drogue », a déclaré Macron dans une vidéo enregistrée au Brésil, avant de saluer l’ex-Premier ministre Garry Conille, qui avait été évincé en raison de divisions avec le conseil, comme un grand leader.

« Ce sont des crétins totaux, ils n’auraient jamais dû le virer », a-t-il dit.

Ses remarques ont déclenché une vague d’indignation en Haïti, ancienne colonie française. Après que Haïti s’est libéré de l’esclavage et a déclaré son indépendance en 1804, il a été contraint de payer à la France une « dette » pour les biens perdus – y compris des esclaves – pendant plus d’un siècle, ce qui, selon certains militants, s’élèverait à plus de 100 milliards de dollars.

Les militants réclament des réparations de la part de la France pour cette dette, que beaucoup considèrent comme responsable des siècles de troubles économiques et politiques en Haïti.

La vidéo montre également le président français attribuant la responsabilité aux Haïtiens pour avoir « laissé le trafic de drogue s’imposer ».

« Honnêtement, ce sont les Haïtiens qui ont tué Haïti », a déclaré le président français dans la vidéo.

Conille, qui, avant de devenir Premier ministre plus tôt cette année, avait occupé un poste important aux Nations Unies, a été remplacé par l’entrepreneur et ancien candidat au Sénat Alix Didier Fils-Aimé, un nouveau coup porté à la stabilité d’une nation dotée d’une classe politique profondément fragmentée alors que près de la moitié de la population souffre d’insécurité alimentaire grave.

La direction d’Haïti est en proie à des luttes intestines et trois membres du conseil présidentiel transitoire – chargé de rétablir la sécurité et de préparer le terrain pour les élections – ont été accusés de corruption. Ils restent en poste.

S’exprimant jeudi au Chili, Macron a semblé adoucir son discours, promettant : « La France ne tournera jamais le dos à une crise … Il n’y aura jamais de double standard face à une tragédie, que ce soit en Haïti, au Venezuela ou aux portes de l’Europe. »

La France a promis 4 millions d’euros (4,2 millions de dollars) à un fonds des Nations Unies finançant une mission de sécurité gravement sous-financée mandatée pour aider à rétablir la sécurité en Haïti, ainsi que des financements pour des cours de français et de créole pour ses troupes.

Le ministère haïtien des Affaires étrangères a indiqué que lors de la réunion, l’ambassadeur de France, Antoine Michon, a promis que la France resterait aux côtés d’Haïti pour aider à rétablir la sécurité et organiser des élections.