squat Paris

Michael Doolittle / Alamy Stock Photo

Être discret, c’est la première règle du squatteur en recherche d’un nouveau toit. Passant d’immeubles en immeubles, ils rivalisent d’ingéniosité pour rester le plus longtemps possible dans un lieu. Lorsqu’ils sont obligés de quitter un logement, la première chose à faire n’est pas de faire ses cartons mais de repérer un autre lieu pour s’y installer. Pour éviter de se faire prendre trop vite, il faut choisir le coin idéal et cela commence toujours par un bâtiment inoccupé.

Faire du repérage pour trouver le parfait squat

Pour vérifier si l’habitation est bel et bien vide, plusieurs indices sont repérables. L’état général du bâtiment est souvent le premier repère. S’il est délabré, sale, si les vitres sont pleines de poussières, le jardin en friche et la boîte aux lettres pleine à craquer, il y a alors de bonnes chances pour que personne n’y soit depuis un moment. Pour être sûr, les squatteurs passent plusieurs fois devant, à différentes heures de la journée pour vérifier s’il n’y a aucun changement notable comme des lumières allumées le soir ou encore des objets déplacés. Certains vont même jusqu’à placer un papier sous la porte ou un chewing-gum sur la serrure pour avoir la certitude que personne ne s’y rend.

Une fois le bâtiment choisi, les futurs occupants notent les différentes entrées possibles (portes, fenêtres etc…) afin de décider du matériel dont ils auront besoin pour y pénétrer. Et les plus malins vont même jusqu’à utiliser le service de consultation des images satellitaires de Google pour analyser d’autres entrées possibles ou des points-clés comme une cour ou un toit qui ne seraient pas visibles depuis l’extérieur. Puis débute une véritable enquête de la part des squatteurs pour connaître le propriétaire des lieux.

Il est d’usage de se renseigner sur le propriétaire auprès du service cadastral du département pour éviter d’avoir affaire à d’autres interlocuteurs lors des négociations. C’est aussi l’occasion de creuser sur l’histoire des lieux et du propriétaire. Articles, voisinage, compte rendu de conseils communaux, tout y passe pour trouver les moindres failles du bâtiment et surtout être certain qu’il n’y a pas de projet de réhabilitation prochainement. Un permis de construire ou de démolir déposé peut laisser penser qu’un projet est en cours, le plus judicieux dans ce cas est de partir à la recherche d’un autre logement. Les squatteurs préfèrent souvent les problèmes d’héritage qui bloquent, pendant des mois voire des années parfois, tout projet de construction, de rénovation, de vente ou de location.

Les bâtiments publics sont également une cible de choix. Lorsqu’ils sont vides, les squatteur peut amener à un débat politique sur le logement et l’urbanisme. Mais cela dépend complètement de l’orientation politique de la ville, certains maires préfèreront négocier et proposer une solution avec un bail précaire tandis que d’autres seront plus répressifs. Une fois tous ces détails vérifiés, il est temps de prendre possession des lieux.

S’installer silencieusement et le plus rapidement possible

Il est préférable d’opérer la nuit pour être moins repérable pour la première entrée dans les lieux mais cela dépend du voisinage et de la disposition du quartier. Tout doit se faire le plus rapidement possible. L’idéal est d’entrer sans forcer quoi que ce soit ou de limiter les dégâts au maximum pour pouvoir les réparer rapidement après pour éviter tout risque de procédure de flagrant délit de dégradation. S’il y a preuve d’effraction, l’affaire passe du civil au pénal. Il est aussi judicieux de prendre des photos du lieu avant l’installation pour montrer qu’il n’y a pas eu de dommage. Une fois à l’intérieur, le groupe doit tout faire pour prétendre qu’il est présent depuis 48h et non quelques minutes. Serviette de douche, décoration, assiettes sales, il faut investir les lieux le plus vite possible et rendre l’endroit viable. Le tout en restant le plus discret possible bien sûr. Il faut transformer un bâtiment vide souvent en mauvais état en un lieu habitable et ne pas hésiter à peindre, réparer et voir même changer la plomberie.

La raison de cette précipitation : la loi qui interdit de déloger des squatteurs installés depuis plus de 48h. Au delà de l’installation, les squatteurs cumulent les “preuves” de leur emménagement depuis plusieurs semaines. Factures de livraisons de repas à domicile ou encore courriers envoyés à l’adresse avant même l’installation sont présentés aux forces de l’ordre une fois qu’ils sont repérés. Ces documents servent à se présenter comme habitants d’un bâtiment inoccupé. Ils peuvent alors invoquer un droit au logement. Depuis 2015, la loi Bouchart a mis fin à cette limite de 48h pour les résidences principales ou secondaires des propriétaires. D’où l’importance pour les squatteurs de bien vérifier s’il ne s’agit pas juste d’un logement inhabité uniquement pour une courte période. L’année dernière, la trêve hivernale, permettant aux squatteurs de rester durant l’hiver dans un bâtiment, a aussi été supprimée.

Se préparer à l’arrivée des forces de l’ordre et du proprio

Le passage de la police, qui arrive inévitablement dans les heures ou les jours à venir, marque officiellement l’arrivée sur place des squatteurs. Les forces de l’ordre contactent alors le propriétaire pour lui signaler l’occupation. Si le propriétaire lance une procédure d’expulsion, un huissier se rend sur place pour constater le squat. Le propriétaire peut alors attaquer les squatteurs en justice.

Une fois assignés en justice, le groupe peuvent jouer sur un certain nombre d’arrêtés pour retarder l’expulsion ou limiter la sanction. Ceux qui gagnent moins que le SMIC ont également droit à une aide juridictionnelle. Un squatteur peut encourir jusqu’à un an d’emprisonnement et 15 000€ d’amende en plus de l’indemnisation du préjudice matériel et moral du propriétaire

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