Les mots ont leur importance et une chose est sûre dans cet océan de doutes qui vous engloutit : il faut parvenir à gagner sa vie. Et pour ça, il faut quelque part accepter de la perdre aussi. C’est comique, non ? Alors que pour beaucoup, le SMIC est devenu un objectif – et non le minimum requis pour espérer vivre dignement –, vous avez plus que jamais raison de vous demander si on ne vous prend pas un peu pour des débiles. Tous les moyens sont bons pour y parvenir pour vous exploiter de manière rentable et optimale. D’autant plus qu’il y a des gens formés pour ça, pour maximiser les logiques d’exploitation et de surveillance. Votre boss en fait peut-être partie. 

Que vous travailliez sur un vélo ou dans un bureau, on passe en revue les nouvelles méthodes mises en place par le monde du travail pour vous presser comme un citron pourtant déjà sec. On ne vous incite évidemment pas à démissionner ; on vous encourage seulement à évaluer le niveau de crasserie de votre boss. 

Votre boss vous propose des CDD de trois mois depuis cinq ans

Cette pratique n’est évidemment pas plus légale que de défoncer le pare-brise de sa voiture à coups d’extincteur ou de foutre son corps dans un mixeur afin d’en faire une grosse boule de plasticine et boucher enfin le trou béant que la précarité a creusé dans votre vie.

10/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss vous inscrit à des formations de merde sans vous en parler

Comme tout bon salaud, votre boss fait ce qu’il veut de vous, puisque vous êtes la force de travail qu’il va convertir en bénéf et que s’il n’agrémente pas votre profil professionnel de points de capacité, son investissement (votre salaire) sera vain. C’est un peu comme dans n’importe quel jeu de MMORPG, quand vous dépensez des ronds pour faire progresser votre perso.

Parce qu’il est persuadé que c’est lui qui vous nourrit, il imagine naturellement votre consentement comme étant acquis (c’est cette même logique tordue qui traverse son esprit quand il poste sur les réseaux sociaux des photos de son bébé trop jeune pour pouvoir s’opposer à cette décision). Le pire dans tout ça, c’est que les formations professionnelles sont la plupart du temps éclatées au sol. Une victoire de l’abstraction sur l’expérience réelle. Au mieux, ça sert d’intro bancale aux seniors qui ont loupé le coche niveau SEO ou montage vidéo

7/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss a installé une pointeuse avec une caméra intelligente qui identifie votre visage

Le pire c’est que votre état mental s’étant sévèrement détérioré depuis que vous avez rejoint cette boîte de merde, la reconnaissance faciale ne comprendra probablement pas qui vous êtes. Si l’alcool et la drogue font des ravages, le surmenage et la pression aussi. 

9/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss vous demande d’évaluer vos collègues

C’est terrible. Toutes ces années à devoir subir le combo vacuité intellectuelle et attitude envahissante de votre horrible binôme – un benêt de première dont le seul but dans la vie est de « visiter » Dubaï – pour au final hésiter au moment de balancer toute son incompétence à votre N+1… Vous êtes finalement quelqu’un de bien, mais pas votre boss.

8/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss sollicite l’aide de client·es mystères

Votre boss n’agite les bras que pour faire de grands gestes vides en réunion. C’est le seul moment qu’il trouve pour exhiber ce tatouage ultra-transgressif qu’il porte à l’avant-bras, un symbole infini qui lui donne un air d’urinoir de maison de jeunes : décoré vite-fait pour se donner un côté djeuns. Donc, soit ça brasse de l’air, soit c’est les mains dans les poches. D’ailleurs, vous avez récemment remarqué qu’il avait activé la commande vocale de son Apple Watch uniquement pour pouvoir demander l’heure sans avoir à lever le poignet – chose qu’il effectue uniquement lorsqu’il s’agit de se branler sur ses propres idées en brainstorming. La dernière trouvaille qui a germé dans son cerveau spongieux ? Faire appel à des client·es mystères. Si vous en doutiez, l’humanité s’est effectivement totalement effondrée le jour où une personne « calée » en marketing a inventé le principe des mystery shoppers. Le truc s’est répandu à tel point qu’aujourd’hui pullulent les sociétés qui permettent aux gens de se faire de la thune ou choper des produits gratuits en se faisant passer pour les client·es régulier·es afin d’évaluer un service et tout balancer ensuite. Sans surprise, ces méthodes sont à la source de certains licenciements. On va éviter toute comparaison hâtive avec d’autres phénomènes dégueulasses, mais ça monte. 

9/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss pique dans vos pourboires

L’énergumène qui gère le bar dans lequel vous travaillez a le statut officiel de « responsable ». C’est responsable ça, de choper une bouteille du stock et partir avec les pourboires pour s’acheter un gramme ? C’est responsable de vous laisser solo le lendemain alors que vous aussi, vous vous êtes retourné le cerveau pour oublier cet horrible boulet ? 

9/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss mate votre profil LinkedIn quasi tous les soirs 

Oh pétard, c’est vraiment, vraiment louche. Il n’y a donc pas que les quatre-quarts pourris du nerd de l’équipe et le spray des chiottes du magasin qui vous remuent le cœur de façon dérangeante à vous en donner des nausées. 

8/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss vous oblige à participer aux team buildings

Oui, c’est sans doute souvent pénible. Par contre, votre boss vous rappelle aussi qu’elle ne vous a jamais obligé·e à taffer, pour 1950 euros net et une voiture de fonction, dans une start-up qui développe une appli qui ne rend pas le monde meilleur. Et ça devrait vous remettre un peu les pieds sur terre

3/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss vient vous les briser à chaque fois que la déléguée syndicale vient vous parler

En plus, elle pue de la bouche quand elle souffle, exaspérée : « Elle t’a dit quoi Marthe là ? C’est par rapport à ton licenciement ? » Il y a des choses comme ça qui restent, qui vous rappellent que vous êtes ce même être infantilisé que vous étiez il y a 20 ans sur les bancs de l’école

8/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss utilise des plateformes en ligne au lieu de vous contacter directement pour vos shifts

Premier·e arrivé·e, premier·e servi·e. Pas mal de jobs précaires et sans contrats à long-terme nécessitent que vous vous inscriviez sur une plateforme afin de réserver d’avance des jours de travail. C’est notamment le cas pour les coursier·es. Certaines sociétés envoient de façon aléatoire ces formulaires en ligne, ce qui vous maintient soit dans un état constant de surveillance de la boîte mail, soit dans l’inactivité totale faute d’avoir pu réserver un créneau. Tous les moyens sont bons pour éviter la moindre minute accordée à l’administratif. 

10/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss vous rappelle que vous vous plaignez beaucoup pour une personne qui bénéficie de congés payés

Rappelez-lui que c’est le minimum obligatoire, et que vous avez même de quoi convaincre votre médecin de vous mettre en arrêt maladie pour burn-out (c’est faux, mais vous connaissez mieux votre médecin que votre boss ne vous connaît). 

8,5/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss se sert de vous pour entraîner des algorithmes

Tant que les livreur·ses Uber restent connecté·es, iels produisent des données. C’est notamment le cas quand iels attendent qu’une commande tombe. Les livreur·ses font leur beurre sur les commandes seulement, et ne sont donc jamais payé·es pour les productions de données. Livreurs, livreuses, force à vous, car beaucoup s’étonnent de vos conditions de travail mais on dirait bien que personne ne se mobilisera jamais pour vos droits. 

10/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss vous met des olives 

Pas un jour sans que votre supérieur vous pointe son doigt dans l’orifice anal (par-dessus le pantalon) quand vous vous penchez pour ramasser un truc. Ces olives répétées, ç’a été une révélation pour vous : vous avez de quoi monter un dossier avec les collègues

10/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss consulte les images des caméras de surveillance sur son smartphone

Se définir par son travail comme votre boss le fait, c’est vraiment un truc de baltringue. Mais c’est fou comme ça ne donne pas plus de capacités qu’un être humain normal pour bien faire son taf. Disons que ça fait plutôt tomber les gens dans une pathétique obsession. Comme le fait que, grâce au progrès technologique, votre boss peut désormais scruter vos moindres faits et gestes depuis son smartphone.

Entre une commande sur Uber Eats et un fast-scroll sur Instagram, les caméras du magasin visent non pas les client·es mais vous, ou pire, votre absence dans le champ de vision qui laisse deviner une pause-clope sauvage. Rassurez-vous, la surveillance permanente des travailleur·ses est interdite (l’employeur·se doit vous informer de tous les aspects à ce niveau).  

8/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss est dans votre ordi

Version télétravail de ce fléau : les trackers d’activité. Avec chacun leurs spécificités, il existe des dizaines et des dizaines de logiciels qui permettent aux entreprises « d’augmenter leur productivité » ou, comme certains en font leur argument de vente, de « détecter des fainéants », notamment en enregistrants vos clics ou en activant votre micro ou votre webcam.

10/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss ne vous vire pas mais…

… vous demande de démissionner. Vous comprenez, avec la pandémie, tout ça, c’était pas facile ces derniers mois. Donc si au moins vous pouviez faire ça, mettre fin à la « collaboration » ou entamer une « reconversion professionnelle ». 

9/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

Votre boss se paye un trip dans l’espace et vous remercie ensuite pour votre contribution

À moins que vous ne travaillez pour l’empire de la déchetterie en ligne, ça ne risque pas d’arriver. Mais si vous faites partie des personnes concernées, il reste un espoir : celui qu’il recommence et, cette fois-ci, se crashe et finisse brûlé. 

10/10 sur l’échelle de la baltringuerie.

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