Les députés soutiennent un projet de loi historique pour légaliser l'assistance au suicide en Angleterre et au pays de Galles.

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Les résidents du sud du pays de Galles déplacés par un trou d’effondrement craignent de ne pas pouvoir revenir...

Les personnes qui ont été évacuées de leurs maisons perchées précocement près d’un grand – et croissant – trou d’effondrement dans le sud du Pays de Galles, qui est apparu suite à la tempête Bert, craignent de ne pas pouvoir revenir d’ici Noël. Le trou d’effondrement s’est ouvert dans une impasse du village de Pant, Merthyr Tydfil après l’effondrement d’un ponceau, une structure qui permet à l’eau de s’écouler sous les routes et les chemins de fer, et a conduit les résidents de 29 maisons à être forcés de fuir. Il a continué à s’étendre, avec d’autres fissures apparaissant à la surface de la rue, Nant Morlais, et dans des murs et des jardins. Le conseil municipal de la région de Merthyr Tydfil dit espérer que les gens pourront revenir pour Noël, mais ses ingénieurs n’ont pas été en mesure…

‘Il s'agit de justice’ : un combattant de la guerre de guérilla intente un procès au gouvernement espagnol pour 1 million d'euros

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‘Il s’agit de justice’ : un combattant de la guerre de guérilla intente un procès au gouvernement espagnol...

Un des derniers combattants survivants de la guerre de guérilla menée contre la dictature de Franco dans les années 1940 poursuit le gouvernement espagnol pour 1 million d’euros de réparations. Joan Busquets, né à Barcelone, 96 ans, a subi des torture, du travail forcé et 20 ans de prison aux mains du régime franquiste. L’affaire fait suite à la loi sur la Mémoire Démocratique de l’Espagne, adoptée en 2022, qui offre des « réparations morales » aux victimes du régime. « La loi propose d’aider les victimes de torture, de travail forcé et d’exil sous la dictature, mais la petite lettre dit qu’elles n’ont pas droit à une compensation financière », a déclaré Busquets. « C’est symbolique, mais mon emprisonnement n’était pas symbolique. » Après la victoire fasciste dans la guerre civile en 1939, des milliers de républicains ont fui en France, dont beaucoup sont…

Agression à l'arme blanche à Béziers : Ronina avait précédemment intimidé une voisine avec un objet tranchant

HERAULT NEWS

Agression à l’arme blanche à Béziers : Ronina avait précédemment intimidé une voisine avec un objet...

La mère de famille soupçonnée d’avoir mortellement poignardé son voisin de palier ce samedi 30 novembre à Béziers avait averti qu’elle passerait un jour à l’acte. C’est ce que rapportent à France Bleu Hérault des voisins proches que nous avons interrogés. La suspecte de 22 ans, consommatrice de cocaïne et d’alcool, est bien connue dans sa rue, tout comme des policiers, pour son comportement violent et hystérique. Plusieurs plaintes et signalements à son encontre ont déjà été déposés. Les récits recueillis sont frappants.

La suspecte avait déjà menacé avec un couteau sa voisine du dessous. Ronina, d’origine serbe, avait déjà brandi une arme blanche dans un couloir, suspectant sa voisine d’avoir abusé de sa fillette de six ans lorsqu’elle était gardée. Cette dernière, qui a depuis quitté l’immeuble pour s’installer un peu plus loin, était lassée du comportement violent de Ronina. L’été dernier, Sandrine avait porté plainte au commissariat de Béziers après avoir été frappée devant chez elle par son ancienne voisine.

La suspecte avait également eu des altercations avec des dealers sous son immeuble. Marie-Christine, résidant juste en face de cet immeuble, a du mal à comprendre comment ce drame a pu se produire. “Ma petite voisine a effectivement été menacée avec un couteau dans son couloir. Sandrine craignait que Ronina aille trop loin. Vous savez, elle s’est déjà battue avec des dealers en bas de l’immeuble et même avec la mère de l’un d’eux. Elle cherchait des ennuis partout. J’ai déjà contacté la police. Elle s’est même attaquée à ma petite fille parce qu’elle est musulmane. Un jour, sans raison, elle a agressé Abdel, le voisin du dernier étage, lui donnant plusieurs coups de pied aux jambes.”

Ronina a tout fait pour l’intimider, en balançant des mégots depuis sa fenêtre sur sa couette ou sur son chat. Sandrine a vraiment enduré l’enfer. C’est pour cette raison qu’elle est partie, ayant été traumatisée après avoir été menacée avec un couteau dans le couloir. La police était déjà intervenue à plusieurs reprises dans cet immeuble après les accès de colère de la mère. Samedi soir, elle s’est acharnée sur la porte de la victime. Des voisins ont rapporté avoir entendu de nombreux cris et des coups violents. “Elle était complètement folle,” dit une autre voisine qui préfère garder l’anonymat. “Je n’ai pas osé monter, j’avais très peur. Je me suis enfermé chez moi.”

Ce Marocain, frappé d’un seul coup de couteau dans la bouche, résidait dans cet immeuble vétuste de la rue Guilhemon depuis plus de trois ans. “C’était quelqu’un de discret, gentil, aimable. Il disait toujours bonjour. Pas un mot plus haut que l’autre,” confie Marie-Christine. “Elle avait déjà défoncé sa porte d’entrée et elle avait déjà menacé de le faire payer, déclarant qu’un jour ou l’autre, elle réglerait ses comptes.” Depuis quelques mois, la victime, travaillant dans les vignes, était donc le souffre-douleur de cette mère de famille. À plusieurs reprises, elle prétendra à des voisins, comme lors de son audition, qu’elle le soupçonnait d’agression sexuelle sur sa fille de six ans. “Alors oui, c’est vrai, elle l’avait soupçonné,” dit Marie-Christine, “mais elle avait également des doutes au sujet de Sandrine, l’ancienne locataire qu’elle était allée tabasser chez elle. Mais vous savez, lorsque Ronina partait en laissant son enfant seule, Sandrine lui donnait à manger. Heureusement qu’elle était là.”

Marie-Christine n’est pas la seule à s’exprimer dans le quartier. D’autres voisins, comme Ienessi, affirment avoir déjà entendu des cris à de nombreuses reprises. Cette mère de famille s’emportait souvent, brisant tout ce qui pouvait l’être. Ses crises d’hystérie étaient répandues. “Cet été, j’ai même appelé la police, car j’avais peur. Elle criait si fort. Elle s’énervait très souvent.” “Un coup elle criait. Un coup elle pleurait. Je n’ai jamais voulu m’en mêler. Elle me faisait vraiment trop peur.”

Le 02/12/2024 Agression au couteau à Béziers : la mère suspectait son voisin d’attouchement sexuel sur sa fille de six ans. La porte d’entrée de la victime, détruite par la voisine © Radio France – Stéfane Pocher

«L’esprit critique» cinéma: silhouettes chinoises et courses de taureaux camarguaises

INVESTIGATIONS

«L’esprit critique» cinéma: silhouettes chinoises et courses de taureaux camarguaises

À travers trois films qui affirment la capacité du cinéma à révéler l’invisible, que ce soit en réanimant le pouvoir d’illusion propre à la jeunesse du 7e art ou en explorant les potentialités du cinéma fantastique, « L’esprit critique » examine aujourd’hui des mondes oubliés, refoulés ou mal connus, afin de faire renaître les paysages, les disparus ou les craintes qu’ils véhiculent. On aborde successivement Grand Tour, le nouveau périple du réalisateur-conteur portugais Miguel Gomes, ainsi que les œuvres de deux réalisatrices franco-algériennes, Animale d’Emma Benestan, qui nous plonge dans l’univers à la fois documentaire et surnaturel des courses camarguaises, et Les Tempêtes, le premier long métrage de Dania Reymond-Boughenou, où des tempêtes de sable jaune ramènent les morts et enfouissent les vivants. « Grand Tour  » Le cinéaste portugais Miguel Gomes, dont chaque œuvre est attendue avec impatience par les amateurs de cinéma depuis son film Tabou sorti au début des années 2010, propose aujourd’hui une nouvelle odyssée cinématographique, historique et poétique, intitulée Grand Tour. Grand Tour débute en 1918, dans la Birmanie coloniale, lorsque Edward, un fonctionnaire de la couronne anglaise, s’échappe de la ville où il devait épouser sa fiancée Molly. Convaincue qu’il est son âme sœur, elle part à sa recherche, traversant différents pays d’Asie tout en suivant le « Grand Tour » réalisé par de nombreux voyageurs britanniques reliant l’Inde à la Chine et au Japon, en passant par la Birmanie ou Singapour. Cependant, le « Grand Tour » proposé par Miguel Gomes ne se limite pas à la géographie, c’est aussi une exploration intérieure du cinéma lui-même, des images animées des théâtres forains existant avant l’invention des frères Lumière aux genres du mélodrame et de la screwball comedy ou « comédie loufoque » hollywoodienne, avec lesquels le film entretient un dialogue continu. Le film a remporté le prix de la mise en scène lors du dernier Festival de Cannes et est en salles depuis mercredi 27 novembre. « Animale » Le premier long métrage de l’actrice, monteuse et réalisatrice Emma Benestan, Fragile, se déroulait à Sète. Animale se déplace à quelques kilomètres, dans les paysages de la Camargue, au sein du monde des « gardians », les éleveurs de taureaux, et des « razeteurs », qui, sans protection, tentent de décrocher la cocarde accrochée sur les cornes du taureau. Dans ce milieu très masculin, Nejma, jouée par Oulaya Amamra, s’efforce de remporter la prochaine course camarguaise, malgré les inquiétudes de sa mère, qui craint qu’un coup de corne mal placé ne lui prive d’enfants, et face aussi aux manifestations surnaturelles qui s’emparent de son corps, tandis que d’autres corps mutilés, attribués à un taureau enragé, sont découverts dans la région… Le film a été présenté en clôture de la Semaine de la critique lors du dernier Festival de Cannes et est en salles depuis mercredi 27 novembre.  « Les Tempêtes » Les Tempêtes est le titre du premier long métrage de la Franco-Algérienne Dania Reymond-Boughenou, née à Alger en 1982 et arrivée en France en 1994 pendant la décennie noire, marquée par le terrorisme islamiste et la répression militaire, qui a frappé son pays d’origine avec des dizaines de milliers de victimes. Bien que l’Algérie ne soit jamais mentionnée dans ce film tourné au Maroc, en raison d’un manque d’accord avec les autorités algériennes, c’est bien cette décennie noire qui hante un film qui choisit de passer par le fantastique pour illustrer comment les morts refoulés peuvent revenir, de manière très littérale, dans le monde des vivants, comme s’ils s’étaient simplement absents pour un long voyage. Ce retour des morts, représenté par Camélia Jordana qui joue l’épouse du personnage principal, un journaliste d’investigation, bénéficie d’une étrange poussière jaune. Celle-ci recouvre les champs et envahit les villes, au point de les engloutir, conférant à la fois le ton, la couleur et la texture granuleuse d’un film à la fois post-traumatique et pré-apocalyptique. Le film est en salles depuis le 20 novembre dernier. Avec :Alice Leroy, qui écrit pour les Cahiers du cinéma et Panthère Première ;Salima Tenfiche, maîtresse de conférences à l’université Sorbonne Nouvelle ;Raphaël Nieuwjaer, qui écrit à la fois pour les Cahiers du cinéma et la revue Études. « L’esprit critique » est un podcast réalisé par Karen Beun.

Emilien Ruiz : « L'objectif d'Emmanuel Macron et de ses administrations, c'est d'atteindre le statut de fonctionnaire »

ECONOMIE

Emilien Ruiz : « L’objectif d’Emmanuel Macron et de ses administrations, c’est d’atteindre le...

Donald Trump n’a pas mis longtemps à réagir après sa victoire à l’élection présidentielle aux États-Unis, annonçant la désignation d’Elon Musk à la tête d’un ministère de « l’efficacité gouvernementale ». Le PDG de Tesla et Space X a exprimé son intention de « démanteler la bureaucratie » et de réduire les financements fédéraux notamment destinés à l’Agence de protection de l’environnement, à la planification familiale ou encore à la radio-télévision publique. Cependant, l’inquiétude ne s’arrête pas là. De ce côté-ci de l’Atlantique, Guillaume Kasbarian, notre ministre de la Fonction publique, a également pris la parole sur X (ex-Twitter, propriété d’Elon Musk). Après avoir félicité le milliardaire pour sa nouvelle fonction, il a écrit :

« J’ai hâte de partager avec vous les meilleures pratiques pour faire face à l’excès de bureaucratie, alléger la paperasse et repenser les structures publiques afin d’accroître l’efficacité des agents publics. »

Cette déclaration, suivie de commentaires sur l’« absentéisme » présumé des fonctionnaires, soulève des craintes pour les services publics. Emilien Ruiz, historien et spécialiste du sujet, auteur de Trop de fonctionnaires ? (Fayard, septembre 2021), nous aide à déchiffrer la vision gouvernementale.

Guillaume Kasbarian espère des conseils d’Elon Musk pour « lutter contre l’excès de bureaucratie […] et améliorer l’efficacité des agents publics ». Quelle interprétation tirer de ses propos ?

Emilien Ruiz : Le tweet a suscité de nombreuses réactions et le ministre a mentionné qu’il ne faisait que saluer un homologue. Pourtant, l’administration Trump ne prendra ses fonctions qu’en janvier. Guillaume Kasbarian a donc rendu hommage à une personne qui n’est pas encore en fonction. De plus, on ne l’a pas vu faire de même avec d’autres homologues en poste.

Son message met en lumière la vision politique qu’il a de son rôle de ministre de la Fonction publique, axée principalement sur des coupes budgétaires. Il semble envisager le secteur public comme une entité à amincir. La conception d’Elon Musk concernant la bureaucratie est très nette : le milliardaire veut libéraliser à tous les niveaux et éliminer certaines administrations.

Il est également frappant de noter que Guillaume Kasbarian n’a pas vraiment été recadré par le Premier ministre. Cela indique que le gouvernement partage, voire assume pleinement, une telle conception de la fonction publique, réduite à un coût à diminuer.

Cela se voit également clairement lorsque l’on examine les profils choisis pour diriger le ministère. Ces dernières années, Emmanuel Macron et ses chefs de gouvernement ont nommé des ministres de plus en plus éloignés de toute culture du service public ou de la fonction publique. Amélie de Montchalin [à ce poste entre 2020 et 2022, NDLR] avait manifesté un intérêt pour les affaires publiques, contrairement à Stanislas Guerini [son successeur jusqu’en septembre 2024, NDLR], formé à HEC, entrepreneur, cadre supérieur dans un groupe international. Un véritable tournant a été observé lorsqu’il a commencé à adopter un positionnement défavorable à la fonction publique en évoquant les licenciements.

Avec Guillaume Kasbarian, on marque une nouvelle étape. Lui aussi formé en école de commerce (l’Essec), son parcours professionnel en dehors de la politique est principalement limité aux grands cabinets de conseil en stratégie, ceux-là même qui ont mis en œuvre, entre 2007 et 2012, la révision générale des politiques publiques (RGPP) de Nicolas Sarkozy. Et on a vu les conséquences : des suppressions de postes de fonctionnaires et une détérioration de la qualité des services.

« Trop nombreux et trop chers » : certaines critiques envers les fonctionnaires sont récurrentes. Quelle est la réalité à ce sujet ?

E. R. : Affirmer qu’il y a trop de fonctionnaires est un discours tenu depuis toujours. Cette question, formulée ainsi, est inappropriée. On ne peut pas rester dans l’indétermination, comme le font de nombreux gouvernements depuis longtemps. La question pertinente serait : « Y a-t-il suffisamment de fonctionnaires au regard de ce qu’on leur demande de réaliser ? »

Cependant, ce gouvernement, comme ceux précédents, esquive cette problématique. Il insiste sur la nécessité de faire des économies, de solliciter la fonction publique et d’opter pour une réduction des effectifs… sans jamais préciser qui sera affecté. À l’opposé d’Elon Musk, qui véhicule une vision claire de l’État en déclarant que les dépenses sociales pour le planning familial doivent être supprimées. En France, les déclarations portent sur l’indemnisation des arrêts maladie des fonctionnaires, mais personne ne s’avance à dire qu’il y aurait un surplus de fonctionnaires dans les secteurs de la sécurité, du social, de l’éducation ou de la culture.

Lorsque le gouvernement annonce d’importantes économies, il agit comme si tous les agents devaient être concernés. Pour éviter de nommer les secteurs les plus touchés—car il n’assume pas de viser l’Education nationale, par exemple—il cible « la bureaucratie » ou « les fonctionnaires » au sens large. Surtout, si l’on examine les discours et les actions depuis 2017 de la part d’Emmanuel Macron et de ses ministres de la Fonction publique – il est clair que ce qui est particulièrement visé, c’est le statut de la fonction publique.

Pourquoi s’en prendre au statut des fonctionnaires ?

E. R. : De nombreuses raisons poussent certains politiques ou think tanks à le remettre en question. La plus évidente est l’argument d’un statut trop protecteur : les fonctionnaires bénéficieraient d’un emploi à vie qui leur permettrait de ne pas travailler. Éliminer le statut pour faciliter les licenciements permettrait de les contraindre à une plus grande productivité. En vérité, cette logique est fallacieuse. Depuis son instauration, le statut inclut des procédures disciplinaires permettant de licencier des agents pour faute ou insuffisance professionnelle.

Un autre argument, parfois avancé contre le statut, concerne l’évolution des attentes des jeunes face à l’emploi, avec l’idée que le CDI stable ne séduit plus. Bien que certains jeunes préfèrent l’intérim ou enchaîner les CDD, je ne suis pas convaincu que cette tendance pour la précarité ait été véritablement corroborée par des études.

Enfin, ce qui semble le plus problématique pour les autorités politiques concernant le statut de la fonction publique, ce sont les droits syndicaux et le droit de grève. Au-delà des questions de l’emploi à vie ou des concours, un enjeu fondamental et historique du statut est la participation des agents à l’administration des services publics. C’est la figure du « fonctionnaire citoyen », impliqué dans les discussions par le biais des organisations syndicales et des représentants du personnel, qui est actuellement remise en cause.

La réforme de 2019 a considérablement diminué le poids et le nombre des représentants syndicaux, par la fusion des comités techniques (CT) et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) dans le comité social, ainsi que par la réduction des attributions des commissions administratives paritaires (CAP). Depuis la fin du XIXe siècle, l’idée que les agents publics puissent se syndiquer et faire grève a toujours suscité questionnements, débats et oppositions. Or, c’est le statut qui garantit ce droit, mis à mal à chaque nouveau mouvement social. On peut s’interroger si, finalement, ce ne sont pas aussi ces remises en cause du statut depuis 2017 qui sont en réalité ciblées.

Un des arguments majeurs du gouvernement consiste à mettre sur le même plan fonction publique et secteur privé…

E. R. : C’est ce qu’avance Guillaume Kasbarian pour justifier l’augmentation des délais de carence pour les fonctionnaires en cas d’arrêt maladie (trois jours au lieu d’un actuellement) et la réduction de l’indemnisation (90 % contre 100 % aujourd’hui). J’y perçois une logique très politicienne de confrontation artificielle entre les secteurs public et privé. En ces temps budgétaires difficiles, affirmer que les fonctionnaires sont des privilégiés permet de détourner l’attention du reste de la population vers ceux qui en auraient plus.

Pour le gouvernement, il est politiquement avantageux de dresser le public contre le privé. Pourtant, les données disponibles montrent que les fonctionnaires ne bénéficient pas forcément de meilleures conditions, que ce soit en matière de pouvoir d’achat ou de prise en charge en cas d’arrêt maladie. Des rapports administratifs soulignent que dans le secteur privé, des accords permettent à 60-70 % des salariés d’obtenir une prise en charge pour les jours de carence et de limiter la baisse de leur salaire, par exemple. Ce qui n’est pas le cas dans le public.

Ce discours critique à l’égard des fonctionnaires est-il spécifique à la France ?

E. R. : Il n’existe pas vraiment d’exception française à ce sujet. Certes, il y a une part de spécificité française dans le statut et le modèle d’une fonction publique de carrière, mais cela ne signifie pas que d’autres pays n’ont pas de statuts ou de modèles similaires. Dans presque tous les pays, y compris aux États-Unis, il existe des agents bénéficiant d’une certaine protection.

Les discours sur les fonctionnaires trop coûteux, sur les bureaucrates, et la nécessité de réduire leur nombre ne sont de toute façon pas propres à la France. Le moteur est identique : on dénonce le nombre d’agents pour cibler en réalité autre chose, cible qui varie selon les dynamiques locales. Par exemple, au Canada, le nombre de fonctionnaires au Québec est fréquemment critiqué comme étant trop élevé. Or, on peut s’interroger si cela ne reflète pas surtout les débats récurrents sur la place de cette province francophone dans la confédération.

En France, comme je l’ai relevé dans mes travaux, les fonctionnaires ont souvent été perçus comme trop loyaux envers le régime précédent. À chaque changement de gouvernement, le « trop d’agents » se traduisait par « trop de loyauté à l’ancien régime dans l’administration ». Peu importe le pays ou l’époque : les critiques contre les fonctionnaires, qui sont en réalité très politiques, visent bien au-delà du simple décompte de leur nombre.

Et la conjoncture économique n’occupe pas une position favorable. Lorsqu’elle se dégrade, comme aujourd’hui, les services publics sont souvent les premiers visés.