Masques obligatoires: cette vieille décision du Conseil d’État qui galvanise les complotistes
En France, elle peine à sortir du bois et des réseaux sociaux, plus de 80% ayant déclaré dans notre sondage YouGov pour Le HuffPost qu’ils porteront le masque en extérieur. Sur Facebook pour l’essentiel, elle se nourrit des volte-face du gouvernement et des atermoiements scientifiques sur la question. Composé de quelques centaines de personnes début juillet, le groupe Facebook “anti masque obligatoire” n’a par exemple cessé d’engranger des membres à mesure que l’appréciation du gouvernement évoluait sur cette protection sanitaire.
Maintenant que le masque est obligatoire dans les lieux clos et dans certains périmètres extérieurs fréquentés, le groupe compte quelque 5200 adeptes. Outre les difficultés du gouvernement à communiquer, ses membres s’échangent interviews scientifiques et décisions juridiques dans l’espoir d’élargir encore leur rang. Et dans cette croisade, un argument tient une place particulière: l’ordonnance du 17 avril rendue par le Conseil d’État.
Ce que disait le Conseil d’État
Que disait alors la plus haute juridiction administrative française? Il faut, pour comprendre leur décision, remonter quatre mois en arrière, dans une France confinée depuis quelques semaines. Alors que la doctrine scientifique évolue peu à peu sur le port du masque, et que le gouvernement commence à changer son discours contraint par la pénurie, le maire (divers droite) de Sceaux Philippe Laurent est le premier à imposer le port du masque à ses administrés dans l’espace public de sa commune, dès le 6 avril.
Trois jours plus tard, sa décision est annulée par le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, puis par le Conseil d’État, saisi par la Ligue des droits de l’Homme, le 17 avril. La plus haute juridiction administrative explique alors qu’un élu local “ne peut, de sa propre initiative, prendre d’autres mesures destinées à lutter contre la catastrophe sanitaire” que celles édictées par l’État.
Et à l’époque, le gouvernement était -très- loin d’imposer le port du masque dans l’espace public. Selon le Conseil d’État, la mesure de Philippe Laurent -évoquée également par Christian Estrosi à l’époque- était même de nature à porter atteinte à “la cohérence et l’efficacité” des décisions prises alors par le gouvernement à l’échelle nationale.
Pire encore: sur ces fondements juridiques, imposer à ses administrés de sortir le visage couvert portait, selon les Sages une “atteinte grave à la liberté fondamentale d’aller et de venir.” “Ce n’est pas de rendre le port du masque obligatoire qui est illicite en tant que tel. Ce qui l’est, c’est que ce soit le maire qui ait prévu cette mesure et non les entités étatiques”, expliquait au HuffPost, l’avocat spécialiste en droit public Louis le Foyer de Costil.
Ce qui a changé depuis
Qu’à cela ne tienne, c’est dans cette brèche que certains anti-masques s’engouffrent aujourd’hui, comme vous pouvez le voir avec les quelques exemples ci-dessous.
@Facebook
@Facebook
@Facebook
Sauf que depuis le mois d’avril, le contexte sanitaire français à changé. La politique gouvernementale sur les gestes barrière aussi.
Terminés les discours fluctuants et les avertissements de la porte-parole du gouvernement sur les dangers de porter le masque. La chose est peu à peu devenue obligatoire dans les transports puis dans les espaces publics clos pour se prémunir d’une recrudescence épidémique.
Mais c’est surtout une disposition annoncée le 31 juillet dernier par le ministre de la Santé Olivier Véran, qui a changé les règles pour les élus locaux, et rendu caduque l’ordonnance du Conseil d’État datant du mois d’avril.
Car imposant le port du masque en intérieur, le gouvernement a aussi donné la possibilité, par décret, aux préfets -et donc aux maires- d’imposer le port du masque à l’extérieur, sur leur territoire. “Dans les cas où le port du masque n’est pas prescrit par le présent décret, le préfet de département est habilité à le rendre obligatoire, sauf dans les locaux d’habitation, lorsque les circonstances locales l’exigent”, est-il écrit dans le texte signé par le Premier ministre.
Explications juridiques, sanitaires ou non, rien n’indique que le début de fronde des anti-masques s’arrête là. Pour l’heure, l’agitation se cantonne à ces échanges en vase clos sur les réseaux sociaux où les Sages sont invoqués pour mieux fustiger “les moutruches”, un néologisme né de la contraction entre moutons et autruches.
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