La France est tout ce que les terroristes détestent
État de droit
La France c’est l’Etat de droit. L’affaiblir, même pour lutter contre le terrorisme, serait en quelques sortes donner raison à ceux qui nous combattent. La différence majeure entre eux et nous, c’est qu’en la terre des droits de l’homme, même un islamiste a le droit à un procès équitable : notre justice n’est pas celle des hommes ou de la vengeance institutionnalisée, elle est celle des Lumières, du principe contradictoire, et de la séparation des pouvoirs. S’il va de soi que contrôler les réseaux sociaux – dont le rôle dans la commission d’actes terroristes n’est plus à démontrer – sera un enjeu politique important, nous devrons veiller, à chaque instant, à ne jamais sacrifier les libertés sur l’autel de la sécurité. Le rôle du Conseil Constitutionnel, quand il a censuré toute ou partie des lois portées par les Députées Laëtitia Avia et Yaël Braun-Pivet, sur la haine en ligne et les auteurs d’infractions terroristes, est salutaire : ne nous laissons pas emporter par le fracas de l’émotion qui étouffe la raison, et malgré l’incroyable dureté des défis que nous affrontons, osons la complexité.
Laïcité
La France, et particulièrement depuis 1905, c’est aussi la laïcité. Assurément, la contestation de ce principe est souvent la première alerte du phénomène de dérive sectaire qui conduit à la radicalisation religieuse. Malgré cela, ce principe de société, qui est « une Constitution dans la Constitution » est très mal compris des citoyens, et trop souvent instrumentalisé par les politiques ces dernières années. Si la séparation des Eglises et de l’Etat signifie la neutralité de la puissance publique et de ceux qui remplissent des missions de service public, en aucun cas elle ne vise la neutralité de la société elle-même ; les citoyens ont le droit de porter des signes religieux ostentatoires, à condition bien-sûr qu’ils ne troublent pas l’ordre public ou qu’ils ne s’inscrivent pas dans une activité prosélyte. Face à cette méconnaissance, il nous faut de la pédagogie, du débat et de la compréhension: le principe de laïcité étant déjà inscrit à l’article 1er de la Constitution, ce n’est pas en l’inscrivant à nouveau dans notre norme suprême que nous résoudrons les maux de la société. Ici encore, oser la pensée.
Fraternité
Enfin, la France c’est aussi la fraternité, que nous devons réincarner. Nos ennemis utilisent les divisions de la société pour fonder leur emprise psychologique : le terrorisme islamiste se nourrit de notre incapacité à produire du commun. Alors que ces derniers mois ont dessiné le trait d’une société de plus en plus morcelée, le risque est clair, son implosion. Face à cela, nos dirigeants politiques n’ont d’autre choix que d’incarner l’humilité face à l’ampleur de la tâche et à la révolution de la pensée que nous impose ce combat de valeurs ; naturellement il ne nous faudra pas compter sur ceux qui depuis des années ont profité de ce morcellement à des fins électoralistes.
Le pays est, face au drame humain que représente l’assassinat d’un enseignant, en droit d’attendre une réponse digne de la part de ceux qui prétendent incarner notre Etat : si évidemment il faut lutter contre le communautarisme en ce qu’il peut, dans certains cas, prétendre s’imposer à la République, il ne faut en rien viser l’uniformisation de la société et l’effacement des différences, ce serait trahir l’idéal républicain français. Face à ce combat de civilisation inédit, nous sommes en droit d’exiger que notre classe politique abandonne l’arrogante facilité qu’elle a, dans les heures qui suivent ces tragédies, à accoucher de solutions qui n’en sont pas.
Abandonnons l’écume des choses
Dans le respect de la République laissons les individus s’habiller comme ils le souhaitent où manger ce qu’ils veulent. Croire que nous résoudrons les problèmes dans les rayons de nos supermarchés ou dans les allées de nos magasins de prêt-à-porter est, ici encore, un renoncement à penser.
La France est tout ce que détestent les terroristes. Elle mérite que nous ne cédions ni à la tentation de la facilité ni à l’assourdissant vide de la pensée. Ainsi nous honorerons la vie de ceux qui, pour la défendre, ont payé le prix de leurs libertés.
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