Un ex-salarié de Kronenbourg avec 177 CDD débouté aux prud’hommes
Le demandeur, aujourd’hui retraité et qui a travaillé de 1992 à 2019 sur le site d’Obernai (Bas-Rhin), “sera débouté de l’ensemble de ses prétentions”, écrit le conseil des prud’hommes de Saverne dans son jugement, que l’AFP a pu consulter.
Dans un communiqué, Kronenbourg s’est félicité de cette décision, “réfut(ant) totalement les allégations de discrimination et de racisme”. L’affaire de ce sexagénaire, père de quatre enfants, avait été largement médiatisée, notamment dans des articles de Rue89 Strasbourg et du quotidien Le Monde.
Mais les conseillers prud’homaux sont restés sourds aux arguments de son avocate, Me Nicole Radius. Ils ont estimé que “je n’apportais aucune preuve” de la discrimination à l’embauche, a-t-elle regretté auprès de l’AFP.
Appel
La juridiction prud’homale considère que Kronenbourg “justifie par la production de documents comptables et économiques du caractère saisonnier de son activité, la consommation de bière étant dépendante des conditions météorologiques et connaissant un pic d’activité saisonnier, variable d’une année sur l’autre”.
Les conseillers n’ont toutefois “pas répondu” à une question, pointe Me Radius: celle de savoir si l’emploi de son client avait, lui, “un caractère saisonnier ou pas”. L’avocate a ainsi annoncé son intention de faire appel.
Kronenbourg écrit dans son communiqué être “conforté par la convention collective qui permet le recours à des contrats de saison durant une partie de l’année”. Lors de l’audience, le 30 novembre, Me Radius avait plaidé la requalification en CDI des “161 missions d’intérim et 16 CDD” cumulés par son client entre 1992 et 2019, principalement dans l’atelier “fûts” de la célèbre brasserie du groupe Carlsberg.
Selon elle, Rabah M. avait demandé dès 2013 à être embauché en CDI mais avait essuyé un refus. En 2019, c’est l’avocate qui avait demandé la requalification en CDI des contrats courts de son client, de nouveau en vain. La brasserie avait ensuite cessé de l’employer.
“Profil bas”
Pour Me Radius, qui réclamait un peu plus de 200.000 euros de dommages et intérêts, ces refus relevaient d’une discrimination. Sur les plus de 270 ouvriers embauchés en CDI entre 2012 et 2019, “aucun n’avait un nom à consonance maghrébine”, a-t-elle fait valoir. Mais sur ce point encore, les prud’hommes de Saverne ont écarté ses arguments.
Le brasseur fournit “des attestations de témoins provenant de délégués syndicaux et membres élus du personnel qui confirment que la discrimination n’a pas place au sein” de la société qui recrute “régulièrement” des “salariés d’origine étrangère”, note la juridiction.
Désormais retraité après deux ans de chômage, Rabah M., qui “a fait profil bas pendant 30 ans”, touche une pension très inférieure à celle à laquelle il pourrait prétendre s’il avait été en CDI, selon son avocate.
Il a occupé des emplois physiquement exigeants qui ont généré chez lui des “acouphènes” et de “l’arthrose” dans les mains. Et la succession de contrats courts et précaires l’a empêché d’obtenir un prêt pour acheter par exemple un logement, a-t-elle souligné. Il a également confié avoir essuyé durant sa carrière à la brasserie des propos racistes de la part de certains collègues, selon Me Radius.
Pour sa part, Kronenbourg a “réaffirmé qu’elle n’a pas été, et ne sera jamais, à l’origine de tels faits (de discrimination et racisme) à l’intérieur comme à l’extérieur de l’entreprise”.
Installée au pied des Vosges où elle emploie entre 700 et 800 personnes, Kronenbourg, outre sa fameuse “Kro”, brasse la “1664″, la “Grimbergen” ou encore la “Skoll”. Elle est actuellement touchée par une grève dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire (NAO), ce qui perturbe sa production. Un accord a été toutefois trouvé lundi entre la direction et les syndicats CFDT et FO, majoritaires, mais la CGT a décidé la poursuite du mouvement.
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