Dans la guerre en Ukraine, les armes chimiques russes sont la hantise des Occidentaux
L’utilisation de cette arme par la Russie est la hantise de la communauté internationale, encore sous le choc des atrocités commises par le régime de Damas en Syrie lors de la guerre civile. Et justement selon les Américains et les Britanniques, Moscou pourrait avoir recours à l’arme chimique en Ukraine au vu des ratés de son offensive militaire qui rendent sa stratégie encore plus imprévisible.
Watch live as I announce actions to continue to hold Russia accountable for its unprovoked and unjustified war on Ukraine. https://t.co/Z7dw6HcXjC
— President Biden (@POTUS) March 11, 2022
De l’autre côté, Moscou accuse aussi Washington et Kiev de gérer des laboratoires destinés à produire en Ukraine des armes biologiques et chimiques, prohibées au plan international par la Convention sur l’interdiction des armes chimiques. Malgré le ferme démenti des Occidentaux, la Russie a demandé en urgence ce vendredi après-midi une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU.
Moscou avait déjà accusé en 2018 les États-Unis de mener secrètement des expérimentations biologiques dans un laboratoire de Géorgie, une autre ex-république soviétique qui, comme l’Ukraine, ambitionne de rejoindre l’Otan et l’Union européenne.
Mais pour les Occidentaux, ces allégations ont tout d’une opération sous fausse bannière, dont le stratagème a été détaillé mercredi par Boris Johnson, Premier ministre britannique. Les Russes “commencent par dire qu’il y a des armes chimiques stockées par leurs opposants ou par les Américains. Et donc, quand eux-mêmes déploient des armes chimiques, comme je crains qu’ils le fassent, ils ont une sorte de maskirovka” -terme russe qui désigne l’art de tromper l’ennemi- “une fausse histoire toute prête”, a-t-il expliqué.
“C’est une technique russe classique que d’accuser les autres de ce qu’ils envisagent de faire eux-mêmes”, a aussi prévenu lors d’une audition parlementaire Victoria Nuland, la numéro trois de la diplomatie américaine.
Les affaires Navalny et Skripal sèment le doute
Il faut dire que la Russie a une longue histoire avec les armes chimiques. Elle s’est elle montrée très complaisante avec le régime de Damas en niant toujours l’utilisation répétée de cette tactique par la Syrie contre les populations civiles. Ces crimes sont très largement restés impunis. En 2013, le président américain Barack Obama (2009-2017), qui en avait pourtant fait une “ligne rouge”, avait renoncé à des frappes punitives en Syrie.
“Vous le savez tous, cela fait partie de la stratégie de la Russie. Elle a utilisé ces armes contre ses propres citoyens, elle l’a au moins encouragé en Syrie et ailleurs. C’est quelque chose que nous devons prendre très au sérieux”, a alerté le directeur de la CIA William Burns, rapporte leGuardian.
À cela s’ajoutent les deux affaires d’empoisonnement à l’aide d’un agent neurotoxique, le Novitchok, visant l’opposant aujourd’hui emprisonné Alexeï Navalny (2020) et l’ancien espion russe Sergueï Skripal, en Angleterre (2018). Les Occidentaux assurent que Moscou, qui nie farouchement, en est le responsable.
L’hypothèse d’un recours aux armes chimiques en Ukraine inquiète également la France, alors que l’armée russe ne remporte pas les succès escomptés. “Vladimir Poutine n’est pas entré dans cette guerre pour la perdre. En cas d’enlisement ou d’humiliation, l’emploi d’armes sales ou d’armes nucléaires tactiques fait partie des possibilités”, estime un haut gradé de l’armée française, sous couvert d’anonymat.
Éviter ”à tout prix” la Troisième Guerre mondiale
“La Russie a raté son entrée en guerre. Il faut sauver la face pour le Kremlin”, fait valoir Mathieu Boulègue, spécialiste de la Russie au centre de réflexion britannique Chatham House. “Le chimique, c’est un vecteur qu’il pourrait tout à fait utiliser. Ce n’est pas improbable”.
Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS), spécialiste des armes chimiques, se montre plus circonspect. “On franchirait une marche supplémentaire dans la terreur et donc la désapprobation des opinions publiques internationales, ce qui risquerait également de renforcer le régime de sanctions qui est déjà extrêmement sévère”, juge-t-il.
“Le seul argument que je vois qui pourrait contredire ma conviction, c’est le précédent syrien, qui laisse à penser que c’est une arme qui a peut-être peu d’intérêt militaire mais une dimension psychologique gigantesque”, poursuit l’expert.
I want to be clear: We will defend every inch of NATO territory with the full might of a united and galvanized NATO.
But we will not fight a war against Russia in Ukraine.
A direct confrontation between NATO and Russia is World War III. And something we must strive to prevent.
— President Biden (@POTUS) March 11, 2022
Mais que veut dire Joe Biden lorsqu’il évoque “le prix fort” à payer? C’est la grande inconnue. Une chose est sûre, malgré ses menaces, l’intervention directe des États-Unis sera toujours écartée car, a justifié le président américain: “Une confrontation directe entre l’Otan et la Russie serait la Troisième Guerre mondiale, et c’est quelque chose que nous devons à tout prix éviter.”
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