Le tatouage et la lingerie après l’ablation de mes deux seins font partie de la reconstruction – BLOG
MA solution: dentelle et tatoos
Mais je n’ai trouvé MA solution qu’après déconstruction des clichés ambiants grâce à un article paru en 2018 dans le magazine Rose-up consacré aux 75% de femmes qui font un autre choix que la chirurgie reconstructrice.
Quitter mes seins n’impliquait pas de renoncer à la dentelle. Or, faute de recourir à des prothèses externes, j’étais condamnée à la brassière de sport, la double peine! Pour pallier cette situation, je me suis offert une œuvre d’art à fleur de peau, un tatouage réalisé par Lisa Fuchs @renarde.tattoo.
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Durant les confinements liés à la pandémie qui correspondaient à mon nouvel arrêt-maladie, j’ai noué des contacts avec des sœurs de combat grâce aux réseaux sociaux en France et à l’étranger. C’est ainsi que j’ai découvert comment nommer mes années d’errance au pays de la reconstruction: Going flat, Aesthetic Flat Closure ou Reconstruction à plat. Influencée par les expériences de femmes américaines (Melly Testa @flyest_flattie, mouvement @flatclosurenow) et canadiennes (Marie-Claude Belzile @tout_aussi_femme, Tina Martel @not_in_the_pink_, @lynda _ouellet ), j’ai réalisé combien ce n’était pas mon problème de vivre sans seins, mais celui d’une société patriarcale qui érotise cet organe.
«La vérité, c’est que ce sont les autres qui se sentent mieux quand je fourre ce machin dans mon soutien-gorge (et j’ajouterai : quand je porte ma perruque) parce que cela leur évite de se confronter, en moi et en eux, à la question de la mortalité et à celle de la différence.»
– Audre Lorde
Elles m’ont aussi renvoyée à la réaction de mon médecin traitant dès le début de cette aventure, lorsque j’exprimais en quoi j’appréhendais plus la chimiothérapie que la mastectomie, combien l’ablation m’avait libérée d’un poids (un 90 D et des tumeurs). Il m’avait parlé d’une femme qui s’était séparée de sa poitrine sans cancer pour piloter des voitures de course. Il se fait que cette femme revient depuis très souvent sur mon chemin via la littérature, elle s’appelle Violette Morris.
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Pour la reconnaissance de la reconstruction à plat en France
Ce serait quoi la démarche de reconnaître la Reconstruction à Plat?
Pour les 70% des femmes mastectomisées qui demeurent Amazones (vivre avec un sein) ou vont à plat (vivre sans sein), ce serait d’accepter leur choix sans insinuer qu’elles ont renoncé à se reconstruire. Leur reconstruction a pris d’autres chemins que ceux proposés par le corps médical ou attendus par la société, c’est tout.
Et pour éviter d’abîmer l’estime de soi inhérente à cette expérience et à ces injonctions, les différentes options de reconstruction sont à valoriser (voir prochainement le clip de la créatrice de lingerie inclusive @bertilleisabeau à ce sujet).
Définir, valoriser, sensibiliser
Quant au regard sociétal, il bougera quand on fera un pas de côté pour regarder autrement la déferlante Rose qui s’annonce chaque mois d’octobre. Tout n’est pas Rose à Cancer Land, bien des combats restent à mener, ne serait-ce que la prévention précoce par les gestes d’autopalpation dès 20 ans, l’accès aux mammographies / échographies bien avant 50 ans, l’accès aux traitements pour les femmes atteintes d’un cancer du sein triple négatif, la recherche concernant les traitements pour le cancer du sein métastatique. Parmi tous ces combats, nous retrouvons la reconnaissance de la Reconstruction à plat.
Si mes différentes expériences photographiques m’ont aidée au cours de ce cheminement à affirmer un choix possible, légitime, ce n’est que l’accès récent à la lingerie adaptée aux métamorphoses de mon corps qui m’a permis de retrouver mon pouvoir: dire JE et dire NON. Mes OUI n’en sont que plus forts. Désormais, je vais à plat, arborant les tattoos de Lisa et les créations de Bertille Isabeau. Les effets indésirables de mes traitements m’amènent à vivre sans cheveux, sans seins, sans ovaires, mais je suis à nouveau parvenue à reprendre mon activité professionnelle.
Cohabiter avec un assaillant externe et le tenir en respect
En amont de ce challenge, je m’en étais fixé un autre, plus ambitieux, pour tester ma résistance. Les bienfaits du sport ont fait leur preuve pour les personnes atteintes de maladies chroniques. Dès la cicatrisation de mon ovariectomie, dès le feu vert médical, j’ai repris la marche à pieds avec pour objectif de parcourir les 220 kilomètres du Tour des Collines du Perche, mon pays natal.
Quand j’ai retrouvé la capacité physique de marcher 30 kilomètres par jour, distance atteinte avant le cancer initial, j’ai su que plus rien ni personne ne pourrait m’atteindre désormais. Au milieu des champs, le long des chemins creux, à travers les forêts, seule ou accompagnée, j’ai revisité l’été dernier ce territoire qui m’est si cher.
Cet effort physique représente pour moi l’aboutissement d’un parcours de soins débuté il y a sept ans, faire la paix avec mon corps: je cohabite avec un assaillant interne, je lui mène la vie dure, je le tiens en respect!
Pour aller plus loin, vous pouvez consulter d’autres contributions de Sarah Poulain en 2021
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