En plein Covid-19, l’odyssée des couples binationaux pour se retrouver
Depuis cette décision prise au mois d’août, 300 documents de ce type ont été délivrés. Certaines demandes ont été refusées sans vraiment d’explications. Pour se retrouver malgré tout et après plus de 8 mois de séparation, plusieurs couples ont pris la décision de partir à l’étranger, se rejoindre dans un pays tiers acceptant les deux nationalités sans aucune restriction.
Mettre des sous de côté, trouver la destination, s’assurer de pouvoir s’y rendre, passer les contrôles aux aéroports… le chemin pour se revoir est long et pour tous les couples, il n’a pas été simple.
Un voyage (presque) sans embûche jusqu’à Saint-Martin
Face à la lenteur de l’administration et surtout au silence total malgré les relances régulières, le couple décide à la mi-septembre de réfléchir par eux-mêmes à une solution pour se revoir. Personne ne peut les éclairer sur l’avancée de leur dossier, énervés et lassés de ne pas avoir de réponses, ils prennent donc les devants.
En l’espace de quelques jours, ils savaient où se retrouver. “J’ai reçu un mail de Corsair Airlines me vantant une promotion sur les Antilles. Susan est tombée sur Saint-Martin, une île ouverte aux Français et aux Américains”, se souvient Jean-Louis. Le Airbnb et les billets pris, ils s’envolent le 6 octobre et vont vivre ensemble durant un mois. Après 8 mois sans s’être vus, ils rattrapent le temps perdu, eux qui s’étaient habitués à ne pas être séparés plus de deux mois. À croire qu’il fallait qu’ils se retrouvent pour avoir une bonne nouvelle, au beau milieu de leurs vacances, le consulat de Miami leur envoie enfin le laissez-passer de Susan. Elle peut venir sur le sol français pendant 15 jours. Le séjour est écourté, ils rentrent en France deux semaines avant la fin.
Si l’histoire de Jean-Louis et de Susan se termine bien, ce n’est pas le cas de tous les autres couples. Pour la majorité des histoires, le choix du pays, le départ et les retrouvailles sont bien plus compliqués.
Les joies des retrouvailles à l’étranger…
“Quand on a su que l’Ukraine fermait, pendant une nuit blanche et une journée complète, j’ai cherché partout une solution. Ma compagne de son côté à regarder avec sa compagnie aérienne pour voir ce qu’il était possible de faire jusqu’au moment où on a su, alors que ce n’était pas encore une information officielle, que la Turquie allait rouvrir ses frontières”, nous confie Jean-Marc. Il décide de modifier ses billets d’avion. “En 48h on avait tout réservé. Mais avant ça, je me suis battu pour pouvoir changer mon billet avec Air France pour rebasculer sur Istanbul. J’ai passé 4h au téléphone à négocier avec eux parce qu’au moment où j’ai voulu rectifier ma réservation, ils m’ont expliqué qu’officiellement les frontières avec l’Ukraine n’étaient pas fermées. J’ai appelé 5 fois pour finir par tomber sur une dame qui a accepté ma demande”, se souvient le Français.
La situation se débloque. Les Airbnb réservés en Ukraine ont pu être annulés sans aucune perte d’argent, car ils avaient fait attention à choisir des lieux qui acceptaient une annulation sans frais.
… la déchirure après la séparation
Le jour des retrouvailles, le sourire à laisser place aux larmes. “Tout le monde nous regardait, les gens pleuraient autour de nous. On ne s’était pas vus depuis 8 mois”. Le couple a ensuite passé 20 jours à visiter la Turquie. Grâce au réseau “Love Is Not Tourism”, ils ont pu rencontrer 8 couples binationaux qui eux aussi, venaient de se retrouver à Istanbul.
Puis, les retrouvailles ont laissé place aux aurevoirs. Ils ont été déchirants. Elle part en premier, lui attend le lendemain. Il se souvient avoir passé “18h à traîner dans l’aéroport” à ne pas savoir quand est ce qu’ils allaient se retrouver. “Il nous a fallu deux semaines pour nous en remettre. On remonte la pente, on se soutient”, conclut Jean-Marc.
Jean-Louis et Susan, Jean-Marc et sa compagne sont chanceux dans leur malheur: ils ont trouvé une solution pour se voir malgré tout. Mais tous n’ont pas les moyens financiers ni la possibilité de voyager plusieurs semaines en Europe ou ailleurs. Alors certains couples se séparent, expliquant que la situation les pousse à se dire qu’ils ne sont pas faits l’un pour l’autre après presque un an sans se voir. D’autres n’en peuvent plus, mais se raccrochent à l’espoir d’obtenir un laissez-passer. Après ces premières retrouvailles, les couples binationaux se demandent s’ils vont pouvoir passer les fêtes de fin d’année ensemble. Jean-Marc commence d’ores et déjà à mettre des sous de côté dans la perspective d’un nouveau voyage à l’étranger.
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