Joe Biden a sa garde rapprochée et vous allez en entendre parler en 2021
Depuis que Donald Trump s’est décidé à valider le processus de transition (sans pour autant accepter la victoire de Joe Biden), le démocrate a annoncé une série de nominations pour ses différents “secretaries” (l’équivalent des ministères français), ainsi que sa garde rapprochée de conseillers: Antony Blinken au département d’État, Janet Yellen au Trésor, Pete Buttigieg aux Transports, Jen Psaki comme porte-parole de la Maison Blanche ou encore Ron Klain au poste stratégique de “chief of staff”…
Leurs points communs? “Ils ont tous de l’expérience sur des postes au sein du gouvernement”, note Shirish Date, correspondant du HuffPost américain à la Maison Blanche. Mais surtout, ils sont tous des anciens de l’administration Obama ou des collègues de longue date de son ancien V.-P. Et ce n’est pas un hasard.
Joe Biden a-t-il pour ambition de recréer une administration Obama III qui ne dit pas son nom pour mener la même politique? Sans aller jusqu’à copier à l’identique son ancien patron, le président-élu n’a jamais caché son désir de faire un bond dans le passé. Et plus précisément, d’effacer les quatre années de présidence Trump.
“C’était tout son propos quand il était candidat. (…) Il a répété encore et encore qu’il n’était pas Donald Trump et qu’il allait redonner aux États-Unis le plus de normalité possible, comme ça l’était auparavant. Il essaie de défaire ce qu’a fait Trump, et c’est ça sa mission”, explique Shirish Date.
Ces choix très homogènes laissent planer un petit air de déjà-vu et n’ont cependant pas convaincu tout le monde, y compris parmi les démocrates. Le représentant de New York Adriano Espaillat a ainsi regretté que la future administration Biden n’ait pas “un peu plus de compétitivité en son sein”. Une administration “n’a pas à être une pièce pleine de personnes que vous aimez”, a-t-il souligné dans le New York Times.
Ces critiques, Joe Biden les a balayées en mettant en avant les compétences de ces futurs ministres – dont la confirmation par le Sénat ne devrait pas poser de problème, à une exception près. Qu’ils soient connus ou inconnus du grand public, les acteurs susceptibles de s’imposer au sein du gouvernement Biden/Haris ont en effet tous quelques cordes à leur arc. Tour d’horizon.
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Xavier Becerra, “la surprise” à la Santé
Lucy Nicholson / Reuters
La raison? En tant que procureur de Californie, Xavier Becerra a multiplié les poursuites contre les décisions de l’administration Trump, tout particulièrement sur le détricotage du Affordable Act Care. De quoi attirer l’attention de Joe Biden, bien que Becerra n’ait aucune compétence particulière dans le domaine de la médecine. “Gérer ce ministère n’est pas forcément en lien avec la médecine pure et dure. C’est un immense département, qui ne se réduit pas à l’aspect sanitaire”, pointe Shirish Date. S’il est confirmé par le Sénat, Xavier Becerra deviendra le premier hispanique à la tête de ce ministère.
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John Kerry et Gina McCarthy pour le climat
ASSOCIATED PRESS
John Kerry aura pour mission de sillonner le monde afin de convaincre ses partenaires de la sincérité de l’engagement américain dans la lutte contre le changement climatique. Voilà pour l’aspect international. Mais à l’échelle nationale, une autre personnalité pourrait se faire une place sur les thématiques climatiques.
Parallèlement à la nomination de Kerry, Joe Biden a aussi nommé Gina McCarthy “conseillère principale de la Maison Blanche sur le changement climatique.” Son rôle? Coordonner les politiques fédérales afin d’atteindre l’objectif de neutralité carbone avant 2050 voulu par Biden.
Gina McCarthy, ancienne présidente de l’Agence de protection de l’Environnement (E.P.A, instance indépendante du gouvernement), sera en terrain connu: on lui doit déjà de très nombreuses mesures pour limiter les émissions de gaz à effet de serre mises en place sous l’administration Obama. Et si le poste en lui-même n’est pas nouveau, les moyens attribués à son bureau laissent présager à Gina McCarthy une importance inédite.
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Alejandro Mayorkas, un immigré cubain à la Sécurité intérieure
ASSOCIATED PRESS
Arrivé bébé aux États-Unis avec sa mère juive roumaine réfugiée à Cuba et son père juif cubain, Alejandro Mayorkas connaît parfaitement les rouages du DHS: de 2013 à 2016, il en fut ministre adjoint, après avoir dirigé pendant quatre ans les services de l’immigration, où il a notamment mis en œuvre le programme de protection DACA, que Donald Trump a décidé en 2017 d’interrompre. Mais le futur chef de l’immigration a d’ores et déjà fait part de sa volonté de le rétablir.
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Antony Blinken, chef de la diplomatie
ASSOCIATED PRESS
Comme une bonne partie de l’équipe, “Tony Blinken” fait partie de l’entourage rapproché de Joe Biden: il a notamment travaillé pour la commission des affaires étrangères du Sénat lorsque Joe Biden en était membre, est un conseiller de longue date du président élu et il a aussi été secrétaire d’État adjoint sous la présidence Obama.
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Jake Sulllivan, conseiller à la Sécurité nationale
ASSOCIATED PRESS
Partout, comme à Oman où il accompagnait la secrétaire d’État Hillary Clinton pendant les négociations sur l’accord nucléaire iranien et dans lesquelles il a joué un rôle important. Après la démission de cette dernière, Jake Sullivan, dont Politico souligne “l’inexorable ascension”, parvient à retrouver son poste du temps de l’administration Obama: il est alors “conseiller à la sécurité nationale” dans l’équipe du vice-président Joe Biden. Lequel n’a donc décidément pas eu à chercher loin pour ses nominations en tant que président.
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Jennifer Psaki, attachée de presse de la Maison Blanche
ASSOCIATED PRESS
Pour l’instant, ce rôle entre dans les attributions de Jen Psaki, qui occupera le poste très en vue d’attachée de presse de la Maison Blanche. À 41 ans, elle est rompue à cet exercice, avec des expériences de porte-parole du département d’État à l’époque de John Kerry ou encore comme directrice de la communication de la Maison Blanche sous l’administration Obama-Biden.
Contrairement à l’ère Trump, dominée par des annonces tweetées et une communication erratique au sein de la Maison Blanche, la présidence Biden devrait marquer le retour à des “points presse” traditionnels. “Nous verrons plus de briefings de la Maison Blanche, ils seront sans doute à nouveau réguliers, donc la personne au poste de “press secretary” va devenir mondialement connue”, avance Shirish Date.
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Mais où est passée Elizabeth Warren?
Elle n’est nulle part: ni parmi les conseillers de Joe Biden ni à la tête d’un ministère. Elizabeth Warren, dernière femme en lice pour les primaires démocrates, pressentie pour le poste de vice-présidente avant que Kamala Harris ne lui pique la place, est pour l’instant la grande absente des nominations de Joe Biden.
Le président-élu lui réserve-t-il le poste de procureur général (le Garde des Sceaux français) encore vacant? Absolument pas, selon Shirish Date, qui évoque plutôt les noms de Sally Yates ou Daniel Jones.
Alors, comment expliquer l’absence de la sénatrice du Massachusetts? Justement parce qu’elle est sénatrice et qu’au Sénat, les démocrates ne peuvent se permettre de perdre un seul siège, nous indique notre collègue du HuffPost américain.
En effet, les élections de novembre n’ont pas permis d’attribuer tous les sièges de la chambre haute du Congrès américain. À ce stade, le parti républicain dispose de 50 sièges, contre 48 pour les démocrates. Les deux sièges encore vacants ne seront occupés qu’à partir du 5 janvier 2021, après des élections en Géorgie qui pourrait faire basculer le Sénat dans un camp ou dans l’autre.
“Si Biden choisissait Warren dans son administration, il perdrait un siège de plus au Sénat. Or, le système veut que si un sénateur quitte son poste pendant son mandat, c’est au gouverneur de choisir quelqu’un pour le remplacer jusqu’aux prochaines élections. Le gouverneur du Massachusetts est républicain: un républicain va très certainement choisir un républicain”, précise Shirish Date, soulignant que ce schéma est aussi valable pour Bernie Sanders, sénateur du Vermont.
Conséquence? Si la majorité républicaine au Sénat était confortée, les lois voulues par l’administration Biden auraient encore moins de chance d’être adoptées. Ce qui écornerait sérieusement les ambitions du président-élu de détricoter minutieusement tout ce que son prédécesseur a accompli.
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