Le cordon bleu, mal-aimé, n’a pas toujours été le symbole de la malbouffe
Le dernier en date a eu lieu le 29 septembre dernier, lorsque la ville de Lyon a annoncé que ce plat pourrait disparaître des cantines scolaires. “Le cordon bleu est un peu le fer de lance des produits alimentaires ultra-transformés, et à ce titre il n’a plus de raison d’être dans les menus des élèves lyonnais”, a précisé le conseiller délégué à l’Alimentation locale et à la Sécurité alimentaire du maire Grégory Doucet à Lyon Mag.
Mais pourquoi tant de haine envers le cordon bleu?
Un plat venu des États-Unis
Qui dit restaurant chic, dit France. Et ce même si le sens n’est pas au rendez-vous. “Le nom français est là principalement pour évoquer le prestige du plat. Il a été choisi pour son pouvoir évocateur plus que pour son sens, il ne renvoie pas à un type de préparation spécifique”, confirme Loïc Bienassis.
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Le terme de cordon bleu n’a pour autant pas été choisi au hasard. L’Ordre du Saint-Esprit est un ordre de chevalerie fondé par Henri III en 1578 et destiné à honorer de grands personnages du royaume. L’usage était de porter la croix de l’ordre sur un ruban bleu ciel. “À partir du premier tiers du XIXe siècle, l’expression ‘cordon bleu’ est employée de manière imagée pour désigner une bonne cuisinière”. Un usage ironique qui consistait à se référer à ce qui était alors l’une des plus hautes distinctions du royaume pour l’appliquer à un savoir domestique.
Pour autant, dans les années 1890, un magazine culinaire est lancé, nommé La cuisinière Cordon Bleu, puis une école de cuisine qui essaimera dans le monde. “Cette expression ‘cordon bleu’ est donc bien connue aux États-Unis au XXe siècle.”
Un plat fait maison avant d’être industriel
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Il n’existe pas de recette canonique au cordon bleu. On peut lui imaginer de multiples racines, un peu comme s’il représentait une partie du melting-pot américain. Pêle-mêle, on peut citer par exemple le “Poulet Kiev” (un blanc de poulet roulé et pané dans un beurre à l’ail), l’escalope milanaise (escalope de veau panée) ou encore la Saltimbocca (escalope de veau enroulée autour d’une tranche de jambon cru et d’une feuille de sauge avec parfois un cœur de mozzarella). Certaines recettes utilisent de la mozzarella, d’autres du “Swiss cheese”, cette imitation nord-américaine de l’emmental.
“La version appelée ‘cordon bleu’ est sans doute une réinterprétation de ces vieilles recettes, apparue dans les années 1950 ou 1960”, supposent les auteurs du livre Cantine Générale, qui retracent l’histoire des plats emblématiques de restaurants scolaires et d’entreprises.
Mais l’industrie agroalimentaire a fait d’un plat aussi réconfortant que gourmand une petite bombe d’additifs et de viande reconstituée. Comme le rappelle Slate, “la composition n’est pas très alléchante: 25% de chapelure, un jambon bien élastique, de la viande ‘complètement refabriquée’ (un ‘filet’ reconstitué avec de la dinde, de l’eau, du sel, des protéines –de gluten ou issues de blancs d’œufs en poudre), un fromage non identifié et des arômes et conservateurs. Au total, il compte une trentaine d’ingrédients! Le site Open Food Facts permet en effet de constater que les listes de composants sont particulièrement longues, comme par exemple chez Casino, Père Dodu ou Le Gaulois”.
Heureusement, certains chefs ont su lui redonner quelques lettres de noblesse. Et ils n’ont pas attendu qu’Emmanuel Macron alors candidat à l’élection présidentielle confie que son amour pour cette viande panée et fromagère, comme vous pouvez le voir dans la vidéo ci-dessous.
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