Le « oui, mais » à « Charlie Hebdo »… une tradition française chez les politiques
Dans le passé, avant que la France ne subisse des attaques terroristes meurtrières motivées par la publication de caricatures du prophète Mahomet dans les colonnes de Charlie Hebdo, les autorités françaises avaient davantage cherché à ménager la susceptibilité du monde musulman en prenant parfois leurs distances avec le journal satirique, en rappelant invariablement leur attachement à la liberté d’expression.
Tout comme l’a fait Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, ce mardi soir sur RTL en disant “oui à la caricature” mais “avec une forme de respect”.
“Ne pas mettre de l’huile sur le feu”
En septembre 2012, après la diffusion sur internet du film “L’innocence des musulmans” décrit à l’époque comme ouvertement islamophobe, la rédaction de Charlie Hebdo, en écho à cette actualité qui embrase une partie d’opinion publique musulmane à travers le monde, décide de publier en pages intérieures des caricatures qui font frémir le pouvoir en place. L’hebdomadaire a beau dénoncer un “film con”, ses dessins représentant le prophète Mahomet nu font craindre le pire.
Au sein du gouvernement français, c’est Jean-Marc Ayrault qui sonne la charge contre le journal dans un communiqué dans lequel le Premier ministre dit “sa désapprobation face à tout excès” dans le “contexte actuel”. “Est-ce que c’est pertinent et intelligent de mettre de l’huile sur le feu? La réponse est non”, répond le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius sur France Info. “Ce qu’a fait Charlie Hebdo, c’est vraiment pas malin. Quand il y a une telle tension, c’est vraiment pas le moment de mettre de l’huile sur le feu. Bien sûr nous sommes pour la liberté d’expression, mais il faut agir en responsabilité”, s’agace le chef de la diplomatie sur BFMTV. Et d’enfoncer sur le clou sur i-Télé: “Je ne vois pas l’utilité d’une provocation que je condamne”, désapprouve le ministre.
“Chaque dessin, chaque déclaration peut attiser des confrontations. Donc, chacun dans la société à sa part de responsabilité”, avertit le ministre de l’Intérieur Manuel Valls qui rappelle également le “caractère fondamental” de la liberté d’expression et de la caricature. “Ménager la chèvre et le chou”, comme le décrit à l’époque L’Obs, c’est aussi l’option choisie par François Hollande. Le président français adresse un message d’apaisement en direction des musulmans. “Les religions doivent être respectées dans notre République laïque”, explique-t-il, avant de proclamer que “la liberté, la laïcité, la dignité ne se négocient pas et ne se négocieront jamais”, comme vous pouvez le voir dans notre montage vidéo.
“Des provocations à éviter”
Début 2006, reproduisant une série de caricatures du prophète Mahomet d’abord publiées dans la presse danoise, Charlie Hebdo s’attire la colère d’associations cultuelles qui l’attaquent en justice. L’hebdo obtiendra finalement gain de cause.
Mais avant que le tribunal ne reconnaisse au journal satirique le droit de blasphémer, l’Élysée tient à faire entendre sa désapprobation. “Je condamne les provocations manifestes susceptibles d’attiser dangereusement les passions”, tance Jacques Chirac.
“Tout ce qui peut blesser les convictions d’autrui, en particulier les convictions religieuses, doit être évité. La liberté d’expression doit s’exercer dans un esprit de responsabilité”, déclare le chef de l’État qui ajoute que “si la liberté d’expression est un des fondements de la République, celle-ci repose également sur les valeurs de tolérance et de respect de toutes les croyances”.
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