L’évolution des personnages LGBTQ+ dans les films et dans les dessins animés
Du Code Hays, qui interdit toute référence explicite à l’homosexualité, à la pétition pour qu’Elsa de « La Reine des neiges » ait une petite amie, les progrès restent très lents.
Et si Bob l’Éponge était homosexuel ? C’est en tout cas ce qu’affirme l’autrice et journaliste américaine Samantha Allen : « Si vous ne saviez pas déjà que Bob l’Éponge est gay, alors vous ne devez pas connaître beaucoup de personnes homosexuelles. Bob l’éponge et Patrick sont immédiatement identifiables comme étant gays pour toute personne ayant un œil pour le « crypto-queer ». Et leur relation est tendre, douce, adorable, et reconnaissable aussi. »
« Quand on est enfant, on veut se reconnaître dans ce qu’on voit à la télévision »
Et cela est éminemment positif pour la représentation des minorités sexuelles dans la pop culture, pour la journaliste. « Cela montre que même si nous n’avons souvent pas la certitude que des personnages sont LGBTQ+ dans les médias pour enfants avec lesquels nous avons grandi, nous cherchons sans cesse ces petits signes, parce que nous voulons voir des gens comme nous. Surtout quand on est enfant, on veut se reconnaître dans ce qu’on voit à la télévision. »
Car les personnages LGBTQ+ sont rarement présents dans les dessins animés. « Exclure consciemment les personnages LGBTQ+ des médias pour enfants, c’est en quelque sorte traiter l’existence de ces personnes comme intrinsèquement sexuelle, ou controversée et inappropriée. Et pourtant, nous ne faisons pas les mêmes suppositions sur les personnages hétéros. Il y a donc là une hypocrisie et un double standard qui, je pense, ont été utilisés dans le passé pour justifier l’exclusion de personnages gays des émissions pour enfants ou des films », estime Samantha Allen.
Les personnages « crypto-queer »
Des années 1930 aux années 1960, le cinéma américain est régi par le Code Hays, qui interdit toute référence explicite au sexe ou à l’homosexualité. C’est à cette époque que l’on voit apparaître des personnages « crypto-queer ». Ceux-ci ne sont pas directement décrits comme LGBTQ+, mais dont leurs manières ou leurs répliques peuvent laisser penser qu’ils sont LGBTQ+. « Ils peuvent porter des vêtements flamboyants ou avoir un type de corps ou une coiffure non normatifs. Peut-être même qu’ils font une sorte de référence cachée à une relation entre personnes du même sexe ou à une identité de genre non-normative », développe Samantha Allen.
Dans les films d’animation classiques, notamment dans les films Disney, le « cryptage queer » semble être, la plupart du temps, opéré sur les méchants pour, en quelque sorte, renforcer leur méchanceté. L’autrice prend l’exemple d’Ursula dans La Petite Sirène, en 1989. « Ursula est inspirée de la célèbre drag queen, Divine. Donc, le « cryptage queer » est assez évident. Mais dans « La Petite Sirène », Ursula n’est pas une drag queen, bien sûr, elle est présentée comme cette espèce de butch lesbienne sinistre », analyse Samantha Allen.
« Libérée, Délivrée », un hymne lesbien ?
En 2016, le hashtag #GiveElsaAGirlfriend a rencontré un énorme succès. Son but : donner une petite amie à l’héroïne de La Reine des Neiges. Pour Samantha Allen, on assiste à une demande grandissante de la part du public de représentation LGBTQ+ dans les films Disney. « Beaucoup de gens ont interprété « Libérée, Délivrée » comme un hymne qui parle de se libérer de ce que le monde pense de vous. Et c’est une chose à laquelle beaucoup de téléspectateurs LGBTQ+ peuvent s’identifier. »
Mais les progrès sont lents. Disney a récemment introduit un personnage gay secondaire dans le remake en live-action de La Belle et La Bête, et un autre dans le film de Pixar, En Avant. Pour constater une meilleure représentation, il faut se tourner vers les fictions plus confidentielles. « Des séries comme « She-Ra » et « Steven Universe », qui sont, je crois, diffusées en streaming et sur les chaînes câblés, sont en train de changer la donne en ce qui concerne la représentation des LGBTQ+ dans les médias pour enfants. Ces émissions sont toutes très récentes, donc ce changement est en train de se produire maintenant », affirme Samantha Allen.
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