Macron sur TF1: ce qu’il faut retenir de son interview « bilan »
L’interview intitulée “Où va la France?”, enregistrée dans les conditions du direct mais malgré tout montée, a permis au chef de l’État de “répondre aux questions que se (posaient) les Français”.
Emmanuel Macron, qui ne s’est ce mercredi soir toujours pas déclaré candidat à un second mandat, s’est aussi s’exprimé “sur la manière dont il a vécu son quinquennat” et “sa vision de l’avenir”.
Ci-dessous, retrouvez toutes les déclarations fortes d’Emmanuel Macron durant cette interview:
Pourquoi il donne cette interview
Emmanuel Macron explique en préambule “que c’est utile d’essayer de récapituler un peu le chemin fait et ce vers quoi notre pays, notre Europe vont”.
“Notre pays a traversé des moments heureux, des moments de succès économiques, qui sont encore là, de succès sportifs, artistiques, mais nous avons traversé des moments difficiles, des moments d’angoisse, notamment cette épidémie. (…) Notre époque est marquée par une forme de retour du tragique”, continue le président de la République.
La situation sanitaire à l’approche de Noël
“Depuis le début celui qui rythme les règles, c’est le virus”, déclare le chef de l’État à l’approche des fêtes de fin d’année.
“Très vraisemblablement, entre Noel et le premier de l’an, nous aurons une très forte pression sur notre hôpital”, alerte-t-il. “Donc ça, c’est la source d’inquiétude. Je pense qu’on a déjà demandé beaucoup. On va continuer à avancer avec, au fond, les trois piliers de notre action: vacciner, vacciner, vacciner.”
La vaccination des enfants
Emmanuel Macron juge que la vaccination des enfants est “souhaitable” mais écarte une obligation. “Entre 5 et 11 ans, les autorités sanitaires ont expliqué que cela protégerait”, “et donc je pense que c’est souhaitable”, dit-il, mais “ils ont rarement des formes graves même si ces dernières semaines, on a eu plusieurs dizaines de cas d’enfants (…) avec des formes graves”.
Les rappels du vaccin contre le Covid-19
Le président considère que des rappels réguliers pourraient être mis en place contre le coronavirus: “Chaque année, (la grippe) revient avec une forme un peu différente. Vous devez vous faire revacciner pour avoir une bonne protection”. “Il est vraisemblable qu’on aille vers cela pour ce virus”, insiste-t-il.
“Beaucoup de nos compatriotes sont fatigués de cette situation”, reconnaît-il, “je suis comme vous”. Mais il se défend d’avoir instauré en raisons de l’épidémie une “société de contrôle permanent”, et préfère parler d’une “société de vigilance” ou de “responsabilité”.
Une obligation vaccinale?
Interrogé sur l’hypothèse d’une obligation vaccinale à terme, y compris pour les adultes, comme pour le tétanos, il l’a juge “tout à fait possible”, même s’il n’évoque pas de décision en ce sens pour l’instant.
Car, fait-il valoir, le pass sanitaire a déjà institué “quasiment une obligation vaccinale”. “On en est quasiment là”, répète-t-il, “quand plus de 90% de ceux qui devaient se faire vacciner se sont fait vacciner”. Mais sur ce sujet “on regardera avec pragmatisme dans les prochaines semaines”, dit-il, sans autre détail.
Le premier confinement
″À l’époque, j’étais attaqué parce que le confinement n’était pas assez dur”, rappelle Emmanuel Macron. “Il y avait un consensus des médecins qui me disaient ‘on est en train de se faire déborder’ et la seule solution, c’est la plus archaïque, c’est le confinement. On n’isole pas les malades, on ferme tout.”
Le manque de masques
“Ce qui s’est passé entre mars et mai 2020, c’est ce que j’ai dit à l’époque aux Français, c’est comme une situation de guerre, c’est-à-dire que nous avons dû tout fermer”, explique Emmanuel Macron. “Mais le monde s’est refermé. Et là où on pensait que ces masques qui ne valaient rien, que ça ne valait plus la peine de le produire chez nous, comme tout le monde au même moment, on en avait besoin ils devenaient rares. Et donc, oui, nous nous sommes retrouvés à ce moment-là. Et ça, c’est la deuxième vulnérabilité après celle du vivant que nous éprouver durant cette crise, c’est celle de la mondialisation. C’est la dépendance.”
Le “quoi qu’il en coûte”
“J’assume tout ce ‘quoi qu’il en coûte’ (…) Nous avons dit dès le début: nous allons aider les entreprises pour qu’elles aident les salariés et c’est exactement ce qui s’est passé”, explique Emmanuel Macron. Cette politique a été possible “parce que nous avions une crédibilité, une solidité, liées aux réformes du marché du travail, à l’attractivité rebâtie”.
“Nous avons aujourd’hui un taux de chômage qui est le plus bas depuis quinze ans”, rappelle le président.
Le président des riches?
“On a le droit de ne pas être la caricature dans laquelle on veut vous enfermer. (…) Je n’ai jamais été ça (le président des riches). Mes valeurs ne sont pas celles d’un président des riches”, se défend le président de la République. “Je sais d’où je viens, mes parents médecins hospitaliers, une grand-mère enseignante. Mes valeurs ne sont pas celles d’un président des riches. Je suis ambitieux pour notre pays, je suis pour un pays fort économiquement, mais pour un pays juste.”
Les deux journalistes abordent aussi la question de l’hyper-présidentialisation du quinquennat: “Tout revient à vous. Est-ce que vous entendez ceux qui disent que c’est trop?”. Emmanuel Macron répond: “Quand on vit une crise aussi importante, vous êtes le débiteur de tout, c’est à dire que les gens se tournent vers vous. Moi, j’aime bien pouvoir maîtriser ce dont je suis responsable.”
L’affaire Benalla
L’affaire Benalla, “ce fut plutôt une affaire d’été qu’une affaire d’État”, estime Emmanuel Macron. “Une affaire d’État est une affaire où l’État est mis en cause.”
″Ça a été un moment difficile. Quand un collaborateur est attaqué, ce n’est jamais agréable. Alexandre Benalla n’a pas été protégé au-delà de ce qu’il devait l’être. Il a été sanctionné administrativement puis exclu de l’Élysée. Il y a ensuite eu une procédure judiciaire qui a suivi son cours.”
“Il me suffit de traverser la rue pour vous trouver un travail”: Macron revient sur sa petite phrase polémique
Emmanuel Macron est interrogé sur plusieurs petites phrases polémiques qu’il a prononcé au cours de son quinquennat, notamment celle prononcée en 2018 face à un jeune chômeur dans le jardin du Luxembourg à Paris: “Il me suffit de traverser la rue pour vous trouver un travail”.
Reprononcerait-il ces mots aujourd’hui? “Certainement pas, (…) parce que je suis arrivé avec une forme de vitalité”, répond-il. “Je ne mesurais pas suffisamment le fait que nous soyons dans une société de la décontextualisation. On est à l’ère où on décontextualise. Le jeune homme dans le jardin du Luxembourg, j’ai passé dix minutes à lui parler”.
Le président reconnaît aussi “avoir blessé des gens” en cherchant à “bousculer les choses”: “Il y a des mots qui peuvent blesser, je pense que ce n’est jamais bon et que c’est même inacceptable, puisque le respect fait partie de la vie politique.” “Je pense que dans certains de mes propos, j’ai blessé des gens et je pense qu’on peut bouger les choses sans blesser des gens et c’est ça que je ne referai plus parce que, au moment où je l’ai fait, je n’ai pas mesuré que je blessais”, insiste-t-il.
Le saccage de l’Arc de Triomphe par des gilets jaunes
“J’ai été touché, marqué, lorsque l’Arc de Triomphe a été souillé”, se remémore le chef de l’État. “Je revenais d’un G20 en Argentine, j’ai senti le désarroi chez les commissaires de la flamme, qui ne s’est jamais éteinte. J’ai vu le désarroi et la colère des riverains. J’ai eu beaucoup d’inquiétude pour le pays.”
La crise des gilets jaunes
La crise des gilets jaunes a “dit des peurs profondes qu’il y a dans notre société”, portée par “cette France qui se sent invisible”, estime Emmanuel Macron.
Cette crise née à l’automne 2018 fut “le moment où les Françaises et les Français, en particulier celles et ceux qui travaillent -parce que beaucoup des gilets jaunes ont un travail, mais ils sont mal payés-” sont allés sur les ronds-points. “C’est cette France qui se sent invisible” qui a manifesté. “Et elle met des gilets jaunes, cette France, parce qu’elle dit: ‘vous ne nous reconnaissez pas’”, ajoute-t-il.
“Ce sont des femmes et des hommes (…) qui, au fond, disent: ‘Vous ne voyez pas, vous ne parlez jamais de nous, notre vie est empêchée, vous voulez faire un monde auquel on ne comprend rien, mais qui est encore moins fait pour nous’”, décrit encore le président. Il fait valoir que “la révolution est possible, mais elle doit se faire avec cette France-là parce que c’est celle qui nous tient, qui nous aide, qui s’occupe de nos anciens, de nos enfants, qui nous fait vivre”.
Sa photo polémique avec des jeunes à Saint-Martin
Emmanuel Macron revient sur la photo polémique qui avait marqué son déplacement sur l’île de Saint-Martin dans les Antilles. “Il faut protéger la fonction. C’est aussi ce que j’ai appris. Par tempérament, je me protège, mais il y a des moments où ce que vous représentez est plus important que vous (…). J’ai été suffisamment naïf pour laisser faire cette photo”, reconnaît le président, tout en disant ne pas avoir “tellement de regrets concernant ce moment”, en considérant “une époque qui n’est ni celle du général de Gaulle, ni celle de François Mitterrand. C’est-à-dire celle du selfie permanent et des réseaux sociaux”.
La banalisation de la parole dans l’espace public
Emmanuel Macron s’attache à rappeler que toutes les voix ne se valent pas au sein d’une société: “On peut souffrir, on peut avoir une parole, on peut avoir un avis sur l’épidémie, sur la crise des gilets jaunes. Nous avons en quelque sorte créé un système où on pense que toutes les paroles se valent. Ce n’est pas vrai. Il y a des gens qui sont démocratiquement élus par le peuple pour porter sa voix. Un député de la République n’est pas l’équivalent d’un manifestant quand il s’agit de parler, parce qu’il a une légitimité démocratique. La parole d’un citoyen ne vaut pas celle d’un scientifique qui vient s’exprimer sur l’épidémie.”
La réforme des 80 km/h
“C’est une bonne décision pour la sécurité routière”, estime le président, sur cette mesure qui a fait beaucoup de mécontents parmi les automobilistes. “Simplement, c’est arrivé à un moment où nos compatriotes n’ont pas compris cette décision. Peut-être qu’elle a été appliquée de manière trop uniforme.”
La réforme des retraites
Emmanuel Macron réitère sa volonté d’aller “vers une sortie de ce qu’on appelle des régimes spéciaux” de retraites, tout en reconnaissant que les faire passer de 42 à un seul, comme il en avait l’intention initialement, est “trop anxiogène”. “Il nous faut aller vers un système simplifié” avec “grosso modo trois grands régimes”, pour la fonction publique, pour les salariés du privé et pour les indépendants, expose-t-il.
“Nous avons besoin de conduire cette réforme”, mais “je ne pense pas qu’il faille exactement faire la même réforme que celle qui était envisagée” et qui, “s’il n’y avait pas eu l’épidémie” de Covid-19 en 2020, “serait allée à son terme, c’est évident”, souligne-t-il. “Il faut simplifier nos règles et (…) qu’on aille tous vers une sortie de ce qu’on appelle des régimes spéciaux”, explique-t-il, rappelant que la France compte “42 régimes aujourd’hui”.
Macron candidat à sa réélection? (acte I)
Interrogé après ses propos sur la réforme des retraites sur son envie de poursuivre les réformes, en se présentant pour sa réélection au mois d’avril, le chef de l’État esquive: “Je l’ai dit, j’agirai jusqu’au dernier quart d’heure. (…) On ne transforme pas un pays en cinq ans et donc je continuerai à me projeter et j’essaie d’avoir l’esprit sérieux.”
Les accusations contre Nicolas Hulot, son ancien ministre
Interrogé sur les accusations de viol et agressions sexuelles pesant sur son ancien ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot, le président répond qu’“en 2018, (il a) fait comme à chaque fois qu’il y a des ministres accusés”: “Je l’ai rencontré et en face de nous nous avons eu un homme manifestement blessé et qui a nié fermement les faits. La Justice ne nous a fait connaître aucune procédure en cours, il est donc resté ministre”.
“Non, je n’ai pas de regret (de l’avoir gardé). On ne peut pas regretter quand on ne sait pas tout”, ajoute-t-il. “Je pourrais vous dire que j’ai regretté de le nommer pour qu’il démissionne plus tard sur un plateau de radio ans m’avertir! Mais, non, je n’ai pas de regret”. “On doit faire attention. Si sur la base d’une accusation vous vous dites ‘c’est fini’, alors il n’y a plus de vie en société”, conclut-il.
La mort de l’enseignant Samuel Paty
Emmanuel Macron estime que la mort de Samuel Paty a ”été un moment de sidération”, ne préférant pas faire de hiérarchie parmi ses pires moments vécus lors du quinquennat: “La mort d’un enseignant parce qu’il enseigne est intolérable dans une société comme la nôtre. La forme qu’a prise cette attaque terroriste a été une sidération terrible, un moment terriblement douloureux”.
“La lutte contre cet islamisme radical (…) est un combat qui doit être mené avec détermination mais sans haine”, ajoute-t-il. “Il faut convertir les esprits, c’est un combat culturel et civilisationnel. Il faut être intraitable à l’égard de ces gens qui utilisent ces messages de mort et veulent saper la république en son sein. Il faut convaincre tous les jeunes que leur avenir c’est la France et la République.”
La théorie du “grand remplacement”
Cette théorie, souvent mise en avant par le candidat d’extrême droite Éric Zemmour, n’existe pas pour le président: “Je ne crois pas au ‘grand remplacement’, il n’est pas là. Mais ce qui est vrai, c’est que ces dernières années, nous n’avons pas assez bien intégré. Parce que notre économie n’était pas assez forte, parce qu’on n’y a pas mis les moyens et parce qu’on a construit les quartiers où on a mis toutes les difficultés au même endroit.”
“Quand on parle de la vie d’une nation sur des phénomènes comme celui-ci, mieux vaut regarder les chiffres. Nous sommes depuis plusieurs décennies une nation d’immigration, avec une part de cette immigration qui s’est intégrée par le travail”, expose encore Emmanuel Macron. “Elle est là parce que nous avons souvent fait appel à elle, elle a aidé notre pays à avancer. Quand j’entends les absurdités ‘immigration zéro’, il n’y a pas d’immigration zéro. Le grand remplacement n’est pas là.”
La crise des sous-marins avec l’Australie
Mi-septembre, l’Australie a rompu un gigantesque contrat passé auprès de la France pour la livraison de sous-marins conventionnels, provoquant la colère de Paris.
“La puissance d’une nation et son rang ne se jugent pas à l’aune d’un contrat industriel”, répond Emmanuel Macron à propos de cette crise qui a secoué les relations diplomatiques entre la France et l’Australie. “Si c’était le cas, nous n’avons jamais eu un tel rang avec les contrats de vente de Rafale, jamais nous n’avons eu autant. Les Australiens se sont mal comportés, c’est une certitude.”
Un résumé rapide de ses cinq années au pouvoir
“Ces cinq années ont été cinq années de joie, de travail sans relâche, de doutes, de difficultés”, synthétise Emmanuel Macron en fin d’interview. “J’ai beaucoup appris aux côtés des Français, à mieux les aimer. (…) J’ai beaucoup parlé de bienveillance en 2017, mais j’ai été dur, j’ai toujours eu cette énergie. J’ai appris à vivre les peines, et à aimer mieux, avec plus d’indulgence et de bienveillance”.
A-t-il des regrets durant son quinquennat? “Je ne fonctionne pas comme ça”, botte-t-il en touche. “Le temps viendra où peut-être je ferai le bilan, et à coup sûr je le ferai et je me dirai que j’aurais pu faire ceci ou cela, mais j’ai essayé de bien faire à chaque instant”, assure Emmanuel Macron. “J’ai fait des erreurs mais j’ai essayé de ne pas les répéter.”
Macron candidat à sa réélection? (acte II)
Les deux journalistes tentent une ultime relance sur la possible candidature du président à sa réélection au printemps. En vain. “Si vous me demandez si j’ai de l’ambition pour le pays après le mois d’avril? D’évidence”, répond-il, sans pour autant accepter de dire qu’il serait candidat. “Je ne suis pas aujourd’hui dans la situation de répondre à cette question, à la fois compte tenu du pays, et compte tenu de moi-même”, selon lui.
“Je sais une chose, c’est que si j’étais aujourd’hui un candidat comme les autres, je ne pourrais pas prendre des décisions que je dois prendre là, maintenant, compte tenu de la situation sanitaire”, estime-t-il. Et il l’assure: il ne souhaite pas “cumuler des années et des années de mandat”. “Je ne suis pas là pour conserver le pouvoir, je suis là pour faire avancer le pays”, conclut-il.
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