Roussel tout proche de créer de faux clivages à gauche
Tout commence avec la question d’un auditeur de franceinfo mardi 29 mars au matin. Jean-Claude, un retraité du Finistère, demande alors au chef de file du PCF s’il est favorable à l’idée de changer les paroles “belliqueuses, racistes, sanguinaires” du chant patriotique dont les premiers couplets ont été écrits par Rouget de Lisle en 1792.
Réponse de l’intéressé: Non, merci. “Toucher à la Marseillaise, c’est toucher au sacré. C’est toucher à la Révolution française, c’est toucher à un hymne, un chant de résistance et de combat (…) j’y suis extrêmement attaché, au drapeau tricolore comme à l’International et son drapeau rouge qui a défendu le monde ouvrier.” Depuis, Fabien Roussel est en boucle. Ou presque.
Pas touche à la Marseillaise
Quelques heures après son passage sur franceinfo le député du Nord se fend d’un tweet acerbe sur le sujet. “Une bande d’hurluberlus me cherche des noises parce que j’ai défendu la Marseillaise”, s’agace-t-il dans un message publié à la mi-journée, avant d’ajouter: “après la sécurité, la bonne bouffe, voilà que certains me reprochent” de soutenir l’hymne national. Le candidat du PCF “assume” sa ligne “coco et cocorico, héritier des valeurs de la Révolution française”, quitte à remettre cela, le lendemain sur LCI et les réseaux sociaux. Un message qui trouve un écho particulier avec plus de 11.000 “j’aime”.
Mais qui sont ces fameux hurluberlus? Contacté par Le HuffPost, Ian Brossat parle d’une “succession de commentaires sous le tweet de franceinfo qui s’indignait que l’on puisse être de gauche et défendre la Marseillaise”. “C’est un peu dans le même ton que ce qu’avaient provoqué ses propos sur la gastronomie et la sécurité”, se désole encore son directeur de campagne.
À une différence près ici: personne, parmi les responsables politiques ne trouve à redire à la déclaration du communiste. Et pour cause, la Marseillaise, critiquée, jadis, par une petite partie de la gauche est désormais assumée de la France insoumise à Europe Ecologie-Les Verts.
Monter dans les sondages
L’hymne résonne à chacun des rassemblements de Jean-Luc Mélenchon… et n’a pas manqué de s’inviter au meeting du candidat écolo Yannick Jadot, dimanche 27 mars, au Zénith de Paris.
Comment expliquer, dès lors, la position de Fabien Roussel sur la question? Cet apparent “seul contre tous” n’en serait donc pas vraiment un? L’engagement du leader communiste sur ce sujet n’est pas sans rappeler, comme le souligne Ian Brossat, son discours sur “la bonne viande bien de chez nous.
Le député du Nord ne rate pas une occasion médiatique ou politique de rappeler son amour pour la gastronomie française. De quoi expliquer sa percée dans les sondages? Le communiste a doublé son score depuis la fin du mois de janvier et sa déclaration sur “un bon vin, une bonne viande, un bon fromage”, comme vous pourrez le voir dans notre compilateur de sondages ci-dessous. Une phrase qui déclenche, à l’époque, les railleries ou les critiques d’une poignée de représentants à gauche, souvent écologistes.
Une visibilité à la sauce coco
Pour Sandrine Rousseau, par exemple, “ces propos excluent une partie de la gastronomie qui a lieu en France”. “Le couscous est le plat préféré des Français”, rappelle-t-elle à ce moment-là sur LCI, ou LCP, quitte à entretenir la prise de bec entre communistes et écolos, et à faire pleuvoir les compliments -souvent venus de la droite- sur Fabien Roussel.
Peu importe. Cette sortie médiatique -et les bisbilles qui ont suivi- aura permis au candidat communiste, relativement peu connu du grand public, de prendre la lumière et de gagner en notoriété. “Si c’est le cas, c’est à l’insu de notre plein gré”, répond Ian Brossat pour qui, il n’existe “aucune volonté de notre part de provoquer la polémique. Cela ne vient jamais de nous.”
Il n’empêche. Ce n’est sans doute pas un hasard si, depuis, candidat de 52 ans insiste -avec une régularité de métronome- sur sa vision de la gastronomie. Comme vous pourrez le voir dans la vidéo ci-dessous, il en remettait une louche, un mois après la polémique, le 9 février, lors d’un meeting en Corse suivi par Le HuffPost.
Et encore, ce mercredi 29 mars, lors d’un grand oral devant la FNSEA, le voilà qui défend, à nouveau, “un bon vin, une bonne viande, un bon fromage”, auquel il ajoute… “une bonne bière”, avec un lapsus en prime.
Une sorte de gimmick qui lui permet, avant tout, de mettre en lumière ce qui différencie sa ligne “populaire” de certains autres projets à gauche. Et que le candidat n’hésite pas à brocarder pour leur propension à “nous dire ce qu’il faut manger, comment il ne faut plus se déplacer, comment on aurait plus le droit d’avoir une maison”.
Et tant pis si ces échanges à fleurets mouchetés tendent à gonfler les clivages -réels- entre les différentes formations. Écolos et communistes s’étaient déjà écharpés en octobre 2021, au tout début de la campagne, sur le thème de la “libération des poulets” -ou du bien-être animal. Un débat qui a trouvé un débouché jeudi 24 mars, sur France 2, où Rousseau et Roussel ont confronté leurs points de vues, tout en se trouvant quelques rapprochements possibles.
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