JE SUIS UN FUGITIF
(They made me a fugitive man) Alberto CAVALCANTI – GB 1947 1h41mn VOSTF – avec Trevor Howard, Sally Gray, Griffith Jones, René Ray… Scénario de Noel Langley, d’après le roman de Jackson Budd.
Du 08/11/23 au 28/11/23
Après-guerre, Clem (Trevor Howard), vétéran de la Royal Air Force, a du mal à se réadapter à la vie civile et accepte de participer à un trafic de marché noir tenu par le cynique Narcy. Lorsque Clem se rebelle à l’idée d’étendre leurs activités à la drogue, Narcy le piège en le faisant arrêter pour l’assassinat d’un policier. Clem s’évade et, après diverses mésaventures, entreprend, aidé par Sally (Sally Gray), l’ex-petite amie de Narcy, de se disculper en retrouvant le truand Soapy, qui avait été témoin du meurtre. Mais Narcy est lui aussi aux trousses de Soapy…
… Je suis un fugitif pourrait bien s’imposer comme le chef-d’œuvre britannique du cosmopolite Alberto Cavalcanti. Dans un aucun autre long métrage de sa période anglaise, il n’aura bénéficié d’autant d’atouts dans tous les domaines (scénaristique, technique, artistique) lui permettant de déployer son talent de metteur en scène de façon éclatante.
C’est un film noir dont la violence et le pessimisme social voisinent avec un humour sarcastique (excellents dialogues signés Noel Langley), au fil d’un récit haletant, où chaque personnage semble être à la fois poursuivant et poursuivi : une gigantesque chasse à l’homme, ou plutôt aux hommes (et aux femmes), avec quelques piques bien senties contre le machisme du pervers Narcy, un mémorable méchant jusqu’à la dernière seconde. Ce qui frappe d’ailleurs, c’est la manière dont certains codes du film criminel sont abordés d’une façon presque légère, comme l’irrésistible « sketch » de la jeune femme impassible qui prend soin de l’évadé avant de lui demander… de tuer son époux !…
Pourtant, en filigrane, la composition obstinée de Trevor Howard, alors au sommet de sa carrière, confère au protagoniste une véritable rage de s’en sortir, en même temps qu’un désespoir social quasi néoréaliste, tempéré par une histoire d’amour qui évite toute mièvrerie.
Il faut signaler enfin la fluidité dans l’art de mêler décors naturels et studio à moindres frais, la narration tendue mais elliptique… et la virtuosité de la caméra qui contribue à l’impression d’un film en mouvement constant, baigné dans un admirable clair-obscur signé Otto Heller.
(N.T. Binh, Dictionnaire du cinéma britannique)
Laisser un commentaire